J’ai rencontré à plusieurs reprises Madeleine Szczodrowski-Fady. C’était au temps où j’allais aux réunions de Haute-Saône Nature Environnement. On trouve dans ce type d’associations des gens qui donnent de leur temps et de leur énergie pour que le monde aille un peu mieux. Madeleine fait partie de ces gens que l’on appelle « militants » avec un grand M. Le communiqué de presse qu’elle vient de publier m’a ému. En voici l’intégralité.
« Ma carte d’identité française étant périmée, je viens d’en solliciter le renouvellement. Or, la sous-préfecture de Lure me demande de prouver, document à l’appui, que je suis bien de nationalité française. Nationalité qui m’a été officiellement reconnue depuis plus de cinquante ans après que je me sois acquittée des formalités nécessaires, mais je ne possède aucun document qui le prouve.
Née en France de parents étrangers non naturalisés (père polonais, mère espagnole), j’ai été pourvue à l’âge de 14 ans d’une carte d’identité polonaise valable jusqu’à ma majorité en avril 1955. A cette date, les autorités françaises m’ont demandé de choisir : conserver ma nationale d’origine ou opter pour la France. J’ai opté pour la nationalité française devant les autorités judiciaires de l’époque. En fonction de quoi m’a été délivré, fin 1955, ma première carte d’identité française, renouvelée depuis sans problème. J’étais demeurée apatride durant sept mois. Lorsque les gendarmes sont venus m’appréhender pour me conduire au camp de Trieste, où étaient internés depuis la fin de la guerre tous les apatrides d’Europe, j’étais en règle depuis la veille seulement.
Me voici en 2008 redevenue apatride, la sous-préfecture m’ayant confirmé oralement le vendredi 16 mai 2008 que ma précédente carte d’identité française ne prouvait rien, et qu’en l’absence de document réclamé elle ne serait pas renouvelée.
Née en France, j’y ai vécu et travaillé toute ma vie. Depuis trente ans mariée à un enseignant fonctionnaire français, j’ai été durant plusieurs années l’assistante d’un parlementaire français devenu par la suite Président de l’Assemblée Nationale – fonction que je n’aurais pu exercer si je n’avais pas été française – et à ce titre j’émargeais au budget de la Nation.
Propriétaire d’une maison, titulaire d’une carte d’électrice, je perçois une retraite, suis assurée sociale, paie mes impôts et mon casier judiciaire est vierge. Bien intégrée dans la société, je crois pouvoir prétendre qu’en ma qualité d’écrivain dont les ouvrages figurent en bonne place à la Bibliothèque Nationale, je parle et j’écris correctement le français.
Il n’empêche qu’à 74 ans, je rejoins la cohorte des sans papiers, des hors la loi, ma carte périmée ne m’ayant pas été restituée. Va t-on en plus me demander de prouver, tests ADN à l’appui, que je suis bien la fille de mes défunts et prétendus père et mère ? Comme le disait Coluche, « jusqu’où s’arrêteront-ils ? ».
Avec le sort réservé aux chômeurs et aux exclus de toute nature dont à présent j’ai l’honneur de faire partie, nous vivons des temps où le grand guignol le dispute à la tragédie. Enfin, si la France ne me supporte pas sans papiers sur sont territoire, qu’elle me fasse embarquer dans un charter. Seulement voilà : m’expulser où ? Le camp de Trieste est fermé depuis belle lurette. »
Merci de relayer cette histoire scandaleuse qui fait honte à notre pays.