On entend souvent dire dans les médias que l’espérance de vie augmente et on suppose même qu’un enfant qui nait aujourd’hui aurait des chances d’arriver à cent ans. La belle affaire ! Vous vous imaginez, vous, en train de passer dix ans de plus de votre vie à croupir sur un fauteuil dans un mouroir pour vieux ?
Mais ce qui m’a toujours semblé procéder de l’arnaque médiatique, c’est qu’aucun des commentateurs ne souligne le décalage dans le temps entre prévisions d’aujourd’hui et réalités de demain. On peut certes dire que la génération des vieux d’aujourd’hui (celle de nos parents ou de nos grands parents, selon l’âge que l’on a) aura vu son espérance de vie supérieure à celle ce la génération d’avant. Mais n’est-ce pas établir des plans sur la comète que d’affirmer que la génération suivante, ou encore la suivante, ou encore la suivante (c’est à dire celle des enfants qui naissent aujourd’hui) vivra encore plus ? D’autant plus que l’on sait que la génération de nos vieux aura vécu une vie complétement différente de celle vécue par les jeunes générations, sur le plan nutritionnel d’abord, mais pas seulement.
J’avais lu un article assez inquiétant il y a quelques années, disant que la courbe commençait de s’inverser aux Etats-Unis et que l’espérance de vie allait diminuer, contrairement aux prévisions optimistes annoncées un peu partout. Mais je n’ai pas gardé l’article et ne me souviens plus du tout où je l’ai lu.
Ce n’est donc pas une surprise pour moi de voir que le nouveau livre de Claude Aubert s’intitule Espérance de vie, la fin des illusions. Je n’ai pas lu cet ouvrage, mais la revue « les quatre saisons du jardinage », éditée comme le livre aux éditions Terre Vivante, lui consacre cinq pages très documentées.
Claude Aubert explique que si des changements d’alimentation sont apparus dans les années 50, c’est à la fin des années 70 et surtout au début des années 80 que se sont généralisées de désastreuses habitudes alimentaires. Les conséquences de ces changements sur l’espérance de vie ne sont pas encore apparu car cette première génération de la « malbouffe » n’a aujourd’hui que trente ans, un âge où les maladies chroniques dues à la mauvaise alimentation (cancers, maladies cardiovasculaires, diabètes,…) attendront encore, pour la grande majorité d’entre elles, encore une vingtaine d’années pour se manifester. L’obésité, qui frappe dès le jeune âge, ne serait donc que la partie émérgée de l’iceberg.
Claude Aubert montre également du doigt d’autres facteurs, comme la sédentarité qui est un comportement aujourd’hui généralisé et dont les conséquences seront, là aussi et pour les mêmes raisons, « à retardement ». Autre gos problème : la pollution du foetus est maintenant une évidence depuis les travaux de la chercheuse américaine Théo Colborn (d’autres travaux récents viennent de montrer que le cordon ombilical des bébés contient en moyenne 200 molécules chimiques de synthèse).
Mais le livre de Claude Aubert se base aussi sur des découvertes récentes alarmantes faites par le monde scientifique, en ce qui concerne la programmation foetales des maladies et sur le fait que certains caractères acquis peuvent se transmettre aux générations futures. Aussi bizarre que cela puisse paraître, un enfant a plus de chances d’être asmathique si la grand-mère a fumé, même si la maman n’a jamais fumé. C’est ce qu’on appelle la transmission épigénétique : le patrimoine génétique n’est en aucun cas modifié, mais certains gènes peuvent devenir « silencieux » ou au contraire être activés. Pour l’auteur, il s’agit là de véritables bombes à retardement.
A ces raisons majeures d’être inquiets, Claude Aubert ajoute la pollution de l’air (y compris la pollution de l’air intérieure due aux matériaux de construction des maisons), l’amiante, les pesticides, l’excès de médicaments et d’alcool, les changements climatiques …
Vous aurez donc compris que l’auteur de ce livre, tel un oiseau de mauvais augure, prévoit dans un premier temps une stagnation, puis une diminution de l’espérance de vie.
Petite note optimiste : les évolutions qu’il prévoit ne sont, d’après lui, pas inéluctables. Mais il faudrait « une volonté politique forte et une prise de conscience tout aussi forte de la part de la population ». Vous y croyez, vous ?