Discographie de Brassens (9)

1969. J’avais quinze ans. C’est à cette époque que j’ai rencontré l’oeuvre de Brassens. D’abord par une seule chanson. Ensuite par un album. La chanson, c’était Les Trompettes de la Renommée (qui figure sur le disque 7). L’album, c’était le 9ème. J’étais en classe de seconde au lycée Gérôme à Vesoul. C’est à la chapelle du lycée que nous nous retrouvions, avec Corinne et d’autres, pour écouter ce disque. Les paroles de Brassens ont probablement dû faire se retourner le Christ de la chapelle sur sa croix. Mais comme il ne pouvait pas se boucher les oreilles (because les clous), c’est probable qu’il garde encore en mémoire aujourd’hui les chansons de l’album 9 et qu’il les connaisse par coeur. Désolé pour ce supplice qui lui a été affligé. Mais j’ai dans l’idée qu’il a peut-être aimé ! Merci à Jean, l’aumonier du lycée, plus tard mon ami, aujourd’hui décédé, d’avoir permis ces moments que je considère aujourd’hui comme surréalistes et qui ont été importants dans mon histoire.

Comme dans tous les disques de Brassens, le thème de la mort est omniprésent. Peut-être plus encore avec ce neuvième disque.

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La première chanson liée à ce thème est un modèle d’écriture. Cette Supplique pour être enterré sur la plage de Sète, Brassens l’a travaillée pendant des années. J’avais lu qu’il avait écrit plus d’une cinquantaine de couplets et qu’il avait ensuite réduit la chanson à treize seulement. Mais même avec treize couplets, vidée des trois quarts de sa longueur, la chanson reste la plus longue jamais enregistrée par Brassens. Dan et Dom m’avaient offert un splendide coffret, reproduction des manuscrits de Brassens. C’est un livre enchanteur, on y suit à la trace la construction de certaines chansons. Voici par exemple un fragment de couplet, non terminé, que Brassens éliminera par la suite de la version finale :

Si l’on pouvait se faire enterrer n’importe où
J’aimerais qu’on creusât ma tombe sur la plage
De Sète mon petit village
Où le sable est si dégueulasse mais si doux.

Puis vient l’histoire cocasse d’une rencontre amoureuse entre Brassens et … un Fantôme de passage. Le sexe y est suggéré d’une manière très drôle : « Je conviai sournoisement, La belle à venir un moment, Voir mes icones mes estampes ». Mais ce genre d’histoire n’arrive pas dans la réalité, ce n’était qu’un rêve, le réveil est un peu brutal et un peu dur avec ce père qui secoue l’oreiller en criant « Vains dieux, tu vas manquer la messe ! ». Très belle chute. Ne dit-on pas d’ailleurs que Brassens commençait la chanson par la chute, puis qu’il la continuait à reculons, à rebours.

De toute l’oeuvre de Brassens, La fessée, est l’une de mes chansons préférées. Les mots sont si évocateurs qu’on imagine précisément la scène, dans tous ses détails. Le cadre est mortuaire, insolite (une chapelle ardente), l’histoire est amorale (draguer la femme d’un copain autour de sa dépouille funèbre), le sexe est plus que suggéré (« menteuse la félure était congénitale ! ») et il y a beaucoup d’humour (« un tablier de sapeur, ma moustache, pensez ») et de tendresse (« et le troisième coup ne fut qu’une caresse »). Du grand Brassens assurément. Une manière de désacraliser la mort. Pourquoi cette chanson n’est-elle pas plus connue ?

La mort donc mais aussi la maladie. Brassens fait taire les bruits qui courent sur son état de santé (ne dit-on pas qu’il est atteint d’un cancer) pour rendre la monnaie de la pièce à la profession journalistique qui colporte des rumeurs. C’est cocasse et il en reste ces vers qu’on gardera longtemps en mémoire :

Si j’ai trahi les gros, les joufflus, les obèses
C’est que je baise, que je baise, que je baise,
Comme un bouc, un bélier, une bête, une brut’
Je suis hanté le rut, le rut, le rut, le rut !

(ce dernier vers étant un pastiche du texte de Mallarmé :
« Je suis hanté : l’azur, l’azur, l’azur, l’azur ! »)

L’amour est l’un des thèmes forts de Brassens, même s’il traite ce thème avec toujours beaucoup de retenue. La non-demande en mariage ne déroge pas à la règle. Il y a beaucoup de pudeur dans ce texte et un immense respect pour l’Autre (« De servante n’ai pas besoin … »).

On a souvent comparé Brassens à un chêne. Mais le chêne, aussi solide puisse-t-il paraître, comporte en lui-même sa propre fragilité. On n’oserait lui mettre en concurrence un vulgaire roseau. Et pourtant … Avec Le grand chêne, nous avons là l’une de ces chansonnettes dont Brassens a le secret. L’histoire est anodine mais la mélodie facile et enjouée fait qu’elle est restée dans la tête du public. Là aussi, toute l’histoire converge vers la chute (de l’histoire, pas de l’arbre) et cette idée un peu folle qu’il pourrait y avoir des arbres qui accèdent au paradis. Belle idée !

Brassens plein de retenue et de pudeur n’a jamais écrit de textes purement autobiographiques. Ce disque contient pourtant deux histoires qui sont largement inspirées d’expériences très personnelles : « Les quatre bacheliers » dans laquelle Brassens revient sur un petit cambriolage auquel il a participé et « L’épave » dans laquelle un flic devient le héros de l’histoire. Le flic est à condamner en tant que symbole mais derrière se tient aussi un Homme. Le discours est nouveau. Mais Brassens reste avant tout un anarchiste et affirme haut et fort, dans une autre chanson « Le pluriel », qu’il croit plus à l’individualité qu’aux groupements de tous poils :

« Le pluriel ne vaut rien à l’homme et sitôt qu’on
Est plus de quatre on est une bande de cons.
Bande à part, sacrebleu ! c’est ma règle et j’y tiens… »

Quelques années plus tôt, avec sa chanson « La complainte des filles de joie », Brassens avait pris parti pour cette profession. Dans ce 9ème disque, il va jusqu’au bout de sa démarche et n’hésite pas à montrer du doigt l’amour libre et celles qui font preuve d’une Concurrence déloyale à l’encontre de nos bonnes professionnelles du sexe. L’époque est à la libération des moeurs, Brassens tient là des propos que d’autres pourraient trouver quelque peu réactionnaires. Cette chanson, qui va à contre-courant de l’époque et de l’air du temps, est sans doute à rapprocher de celle qu’il écrira plus tard, une petite merveille d’écriture : « Chansonnette à celle qui reste pucelle ». Mais nous en reparlerons ultérieurement.

Brassens a toujours été tourné vers le passé. « Hors du temps, intemporel » diront les admirateurs, « passéiste », voire « vieux con » diront les plus critiques. Avec « le Moyenâgeux », Brassens affirme sans ambiguïté son attirance pour une époque lointaine. On sait que Brassens a vécu, même au sommet de la gloire, dans l’appartement de « la Jeanne » dans des conditions de confort plus que spartiates. Brassens n’a jamais eu besoin que du minimum vital. Et même le lit ne fait pas partie de ce minimum vital :

Je mourrai pas à Montfaucon,
Mais dans un lit comme un vrai con.
Je mourrai même pas pendard
Avec cinq siècles de retard.

Avec Le Moyenâgeux s’achève le 9ème album. Cette chanson est effectivement la conclusion d’un disque (« l’album de la maturité ») qui, écouté avec quarante ans de recul, n’a pas pris d’âge, est resté un peu hors du temps et garde aujourd’hui encore toute sa fraîcheur et sa portée.

Le poids des mots

Le choix des mots est important. Certains journalistes utilisent des adjectifs qui sont lourds de signification. Ainsi, quelques-uns de ces gratte-papiers, dont ceux du Monde, nous parlent actuellement « d’extrême-droite radicale » (pour qualifier la réunion qui s’est tenue il y a quinze jours à Paris entre catholiques traditionnalistes, racialistes et autres illuminés de la mouvance facho).

Cet adjectif de radical laisserait à penser qu’il existerait une autre extrême-droite plus ordinaire, presque normale et presque respectable. En un mot » acceptable ». Et ça, ça ne l’est pas !

Je ne sais pas quelle attitude il faut adopter face au parti extrémisme. J’avais été très sensible aux arguments défendus ici sur ce blog qui affirmaient que plus on diabolisait ce parti, plus on favorise sa montée en puissance. J’en conviens. Du bout des lèvres, mais j’en conviens. Mais en même temps, les idées extrémistes se propagent aussi rapidement quand on respectabilise le discours du FN. Ce parti joue sur deux tableaux a priori opposés. La stratégie est double. Voire triple car les idées extrémistes se propagent aussi de manière rampante et insidieuse.

Et ne venez pas me dire que la forte baisse du FN lors des dernières élections est un bon signe. Il y a juste des idées extrémistes qui ont fortement imprégné tous les discours ambiants.

J’avoue que je suis plutôt désorienté.

L’amour, une bien belle partition … !

Il me semble que depuis une dizaine de jours, il se passe quelque chose sur ce blog.

Il a a eu d’abord le premier article d’une série intitulée Qui c’est VOUS ? Je crois que par cet article les blogueurs ont appris à mieux se connaître. En tous les cas, la musique qu’écoutent les uns et les autres a semble-t-il intrigué et intéressé chacun d’entre nous.

Et puis ensuite le texte Travailler plus … m’a permis d’inaugurer une série d’articles différents que je n’avais pas encore osé faire. Le sujet de cet article était la vie en couple. Il était facile de tomber dans quelque chose de trop intime. Je m’attendais soit à un flop soit à une dérive. Mais cet écueil a été évité. La discussion a duré longtemps (on en est à 80 commentaires). Elle dure encore, je vous conseille d’aller y faire un tour et d’apporter votre contribution, le sujet est loin d’être clos. De très belles phrases ont été écrites. A propos de la phrase « aimer, c’est déchiffrer une partition », Claudine m’a envoyé ce soir, à point nommé, une très belle image qui permet de l’illustrer.

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A nous de nous exercer à jouer toutes les notes de cette partition !

Les ders de la der des ders

 

Il n’en reste plus que deux et la France entière se penche sur eux. Il y a quelques années, Chirac caressait le rêve de mettre au Panthéon le corps du dernier Poilu. Beaucoup de gens plus jeunes aimeraient ainsi passer à la postérité. Mais voilà que nos deux vieux, forts de leurs 110 années d’expérience, clament haut et fort que ça ne les intéresse pas. C’est pourtant tentant. Ils réfutent même l’idée de funérailles nationales. Pas d’autre ambition que de partir entouré des proches pour un dernier voyage au cimetière familial.

Et cette humilité me plait bien.

Ces deux derniers survivants sont un véritable symbole. L’un est un immigré Italien qui a triché sur son âge pour pouvoir se battre pour son pays d’adoption. Tous deux sont des pacifistes convaincus. Les journaux ont d’ailleurs largement mis en avant les mots justes de ces deux vieillards contre l’absurdité de la guerre. « Un truc absurde, inutile ! A quoi sert de massacrer des gens ? Rien ne peut le justifier, rien ! ».

Probablement aurait-on dû donner la parole aux témoins de l’horreur beaucoup plus tôt ! Les forcer à raconter l’inracontable. Dès 1918 ! Des deux côtés de la frontière ! J’aime imaginer que le reste du siècle en aurait peut-être été différent.

Petit dimanche musical (2)

Vos goûts musicaux présentés dans les commentaires de mon article C’est qui vous ? sont si riches qu’ils vont encore me servir de matière pour les prochains « dimanches en musiques » de ce blog. Voici donc une nouvelle fois un petit mélange sympa « de derrière vos fagots » destiné à faire connaître des artistes pas forcément connus de nous tous.

Commençons par une vidéo de James Blunter choisie par Fred.

Mais aussi Norah Jones (choix de Christophe), Time, extrait de Delicate Sound of Thunder de Pink Floyd (Vincent), My My Hey Hey, extrait de Rust Never Sleeps de Neil Young (Anne), Les patineurs de Clarika (Nanou), Infest de Papa Roach (Nico), Marc-Antoine Charpentier (Joëlle), Take your mama out des Scissor Sisters (Oups), Sleeping Fire to Sleeping Giants, extrait de Miss Machine de Dillinger Escape Plan (Steph), Minuano de Marcio Faraco (Serenense) et Isis, extrait de Desire de Bob Dylan (moi-même).

Il doit y avoir un truc …

Il doit vraiment y avoir un truc chez Harry Potter pour que le succès du livre soit devenu planétaire. J’ai cherché mais je n’ai pas trouvé le truc. Je suis pourtant bon public. Quand on me fait écouter n’importe quelle musique, je rentre vite dedans. Un film ? J’aime tous les films que j’ai l’occasion de regarder, je n’ai pas vraiment un esprit critique très développé. De toute façon, j’en regarde rarement. Les livres ? Dès que je prends un bouquin, j’aime en général, que ce soit un pollar, un roman ou un essai.

Je n’ai pas accroché à Harry Potter et pourtant je suis plutôt prédisposé à aimer. Car les sorciers, je connais ! J’ai lu trois fois « le Seigneur des Anneaux » puis plus tard de grands épopées telles que « les chants de la Belgariade » suivi des « chants de la Mallorée » (4000 pages), « le secret de Ji », « la Citadelle des ombres », « les chroniques d’Arcturus » et j’attaque actuellement le sixième tome de « l’épée de vérité » (4000 pages aussi).

Comme tout le monde parlait de Harry Potter, j’ai lu le premier tome. Je n’ai pas vraiment accroché mais j’ai quand même fait preuve de persévérance car j’ai ensuite lu le deuxième, le troisième et le quatrième (avec un intérêt je dois dire très relatif). Et finalement j’ai calé en plein milieu du cinquième tome. La mayonnaise n’a pas pris, je n’en connais pas la raison, ça doit arriver ce genre de déception.

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Mais c’est sûr qu’il y a un truc dans Harry Potter, un vrai truc pour que ça marche autant. J’en suis évidemment persuadé. Sauf que je n’ai pas trouvé la clé. Y’a quelqu’un qui veut bien me la donner ?

Un drôle de zèbre

Drôle d’aventure que celle de ce zèbre offert au 19ème siècle par un gouvernant africain à Jules Grévy, alors Président de la Rébublique Française. Mis en captivité (le zèbre, pas le président !), il allait être identifié comme appartenant à une espèce inconnue. Les scientifiques ont alors donné le nom de Grévy à ce nouvel animal. Le zèbre de Grévy fait aujourd’hui partie des trois seules espèces de zèbres connues au monde.

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Nul autre Président de la république Française n’est venu depuis concurrencer Grévy dans ce domaine. Même si Sarko est apparemment un drôle de zèbre apparaissant sporadiquement et presque simultanément à tous les coins de la planète, il est très peu probable que soit découverte un jour une nouvelle espèce à qui l’on donnera son nom. Il aurait fallu pour cela que notre président naisse à une époque où la découverte de nouvelles espèces de mammifères était encore possible. Je dois d’ailleurs dire – et vous vous en doutez – que ça ne m’aurait pas déplu qu’il naisse effectivement à une autre époque que la mienne !

Mon ami Samuel Delon est un grand connaisseur de la faune africaine (une quinzaine de voyages d’étude à son actif) et notamment du zèbre de Grévy qu’il suit à chacun de ses voyages. Je crois même que l’idée d’un ouvrage consacré entièrement à cette espèce est en train de le titiller. Samuel est actuellement au Kenya et reviendra juste à temps samedi 10 novembre à 18H salle Proudhon à Besançon pour le vernissage de son exposition consacrée exclusivement au zèbre de Grévy. Avant de partir, Samuel Delon m’a fait savoir que tous les lecteurs de ce blog étaient invités à ce vernissage. Cette exposition est réalisée dans le cadre d’une exposition plus large sur l’Afrique, auquelle ont participé d’autres franc-comtois passionnés. L’expo sera en place jusqu’au jeudi 15 novembre.

Travailler plus … ?

Je ne rate jamais « le courrier des lecteurs » de Télérama. C’est encore ce qu’il y a de plus intéressant dans ce journal et c’est surtout la seule rubrique qui échappe à un certain parisiannisme. La semaine dernière, le courrier de Laurent, habitant de Marsac, m’a bien fait rire : « Travaillez plus pour perdre sa femme ? Non merci ! ».

Evidemment, dans le contexte politique actuel, ça fait sourire. Mais je ne voudrais pas insister trop sur cet aspect là. Il me semble que, d’une manière plus générale, l’activisme lié à notre époque, y compris sur le plan professionnel, n’est pas de nature à favoriser la durabilité des couples. Sujet délicat qui n’est pas du tout le genre de sujet habituellement abordé sur ce blog. Tant pis, c’est lancé !

La roquette, herbe piquante

Voici le premier article d’une série consacrée à des plantes précieuses pour le cuisinier : les aromatiques. Sans elles, la table serait plus terne. Difficile d’imaginer un potage sans une feuille de céleri-branche ou quelques brins de cerfeuil, une salade sans échalote ou feuille de basilic, un lapin sans un petit brin de romarin …

Je ne sais pas trop si la roquette fait habituellement partie des plantes aromatiques. A priori non, elle est plutôt classée dans les salades. Mais sa saveur piquante en fait un aromate idéal pour les crudités et justifie sa présence dans cette nouvelle série d’articles. Depuis quelques mois, elle est l’une de mes plantes fétiches et j’en utilise de plus en plus souvent, notamment dans les salades.

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On considère que la roquette est arrivée d’Asie en même temps que les premières céréales dont elle était la compagne dans les cultures. Depuis cette époque, elle se rencontre à l’état spontané dans les cultures et les terrains vagues du sud de la France (ainsi qu’environ 35 espèces sauvages qui peuvent être consommées comme salades).

La roquette a d’abord été récoltée dans la nature à l’état sauvage. Les Romains en ajoutaient toujours quelques feuilles à la laitue afin d’en relever le goût. Plus tard, Charlemagne inclut la roquette dans la liste des denrées que doit produire, selon lui, une villa carolingienne, ce qui est un véritable honneur car au Moyen Age, en France, les légumes ne sont guère considérés. Aujourd’hui, il n’existe toujours qu’une seule variété de roquette, extrêmement proche de l’espèce sauvage.

Comme pour le cresson ou la moutarde, la roquette doit sa saveur piquante à des composés souffrés. Beaucoup d’auteurs grecs et latins ont rapporté ses vertus toniques, apéritives, digestives, diurétiques, antiscorbutiques et surtout excitantes, la roquette étant considérée comme aphrodisiaque. Pour cette dernière raison, Hildegarde l’avait proscrite des jardins monastiques mais je ne pense pas que cela ait empêché nos braves moines de faire le mur chaque nuit en direction du couvent d’en face (comme l’a si bien rapporté Brassens dans sa chanson Le Moyenâgeux). Et puis, ces braves moines ne se faisaient-ils pas envoyer en douce, par-dessus le mur du monastère, d’importantes quantités de cette salade grâce aux premiers lances-roquettes inventés pour cette si belle occasion !

Petit dimanche musical

Voici un petit patchwork musical réalisé à partir des artistes que vous avez cités dans vos listes de disques préférés. J’ai essayé de tenir compte de la diversité de vos choix.

D’abord une vidéo d’Arno (interprétant une chanson des Rolling Stones) cité par Anne.

Mais aussi Jean Ferrat chante Aragon (proposition de Vincent), Nirvana (Nico), Mayra Andrade (Serenense), Prince (Oups), Jacques Brel (Joëlle), U2 (Fred), David Russell (Stéph), Anne Sylvestre (Nanou) et Archie Shepp (moi-même).

Bon dimanche en musiques.

Le syndrome de l’île déserte

A peine arrivé de Belgique en fin de matinée, je suis vite allé lire les commentaires sur mon dernier article, intrigué d’avance par les réponses au petit jeu (qui n’en est pas vraiment un) lancé avant de partir. Heureuse surprise d’abord d’y voir de nouveaux arrivés … et j’espère bientôt d’autres encore. Beaucoup de diversité dans les musiques écoutées par les un(e)s et les autres (je vais d’ailleurs essayer de trouver l’occasion d’écouter les artistes cités qui me sont inconnus). Très peu de musique classique citée, pas trop de jazz mais Mag va, j’espère, nous faire un plaisir de nous sortir une petite liste de derrière les fagots dès son retour de Texel. Beaucoup de diversité mais aussi quelques recoupements entre les différentes listes (Louis & Ella, Stan Getz, Brassens, Bernard Haillant). J’aurais pu mettre dans ma propre liste « le double blanc » des Beatles choisi par Anne, « On n’est pas sérieux quand on a 17 ans » de Ferré cité par Vincent, peut-être même Tryo (proposé par Nico) que j’écoute souvent mais qui n’est pas encore à mon Top10…

Hier soir, Stéphane me disait qu’il fallait faire la différence entre les disques qu’on écoute le plus souvent et « les » disques qu’on emmènerait sur une île déserte. Effectivement, ce n’est pas tout à fait la même chose. Ce qui m’a amené à me poser la question : « Qu’est-ce que j’amènerais vraiment comme musique sur une île déserte ? ». Une vraie île déserte, une dont on n’est pas sûr de revenir. Et bien, au risque de déconcerter ceux qui pensent que la musique est vitale pour moi (ce qui a été vrai pour toute ma vie jusqu’à présent), je crois que je n’emmènerais rien du tout. Aucun disque. Je pense que je pourrais me contenter du silence, du bruit des vagues, du cri des mouettes et de ma petite voix intérieure (si j’arrive à la trouver). Dylan, Ferré ou Miles Davis me sembleraient incongrus dans une telle situation. Je me demande si Bach lui-même ne viendrait pas rompre cette harmonie de l’homme face à l’immensité de la nature … et/ou du vide.

Mais peut-être emmènerais-je quand même avec moi ma guitare et les partitions de Brassens. Histoire de garder un tant soit peu le contact avec la parole et notre langue … au cas où il me serait permis de retrouver un jour la civilisation. Et puis je m’imagine assez bien en train de chanter face à l’océan. Mouettes et goélands qui ne brillent pas par leur voix mélodieuse (c’est le moins qu’on puisse dire) accepteraient facilement je crois mes fausses notes et – qui sait – me prendrait peut-être pour un des leurs.

Je pense aussi qu’arrivé à une certaine étape de sa vie, l’Homme placé dans ce genre de situation trouverait peut-être dans cette solitude (imposée, acceptée ou même voulue) ce qui lui manque le plus dans notre vie moderne : silence, écoute de soi, lenteur, sobriété, vie au rythme du temps et des saisons … et frôlerait peut-être ainsi le vrai sens de la vie.

C’est qui VOUS ? (1)

J’ai envie de mieux connaître les goûts des personnes qui viennent sur ce blog. Juste pour me faire une idée de ce qu’elles écoutent comme musique, regardent comme films, lisent comme bourquins, aiment en général, et que sais-je encore. La seule finalité est que l’on puisse échanger aussi sur ces sujets.

Peut-être que cette nouvelle rubrique est vouée à l’échec. Mais bon, en voici le premier article, consacré à la musique.

Voici par exemple la liste de mes 10 disques préférés, classés sans ordre particulier (bien que l’Electric Ladyland de Jimi Hendrix soit sans doute celui qui, tous genres confondus, remporte tous mes suffrages). C’est une liste faite « à la va vite » en deux minutes, il s’agit là des noms qui me sont venus tout de suite à l’esprit (il est certain que si j’allais regarder dans ma discothèque, je serais scandalisé d’avoir oublié certains disques que, dans d’autres circonstances, j’aurais sans doute trouvé essentiels).

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Electric Ladyland de Jimi Hendrix
Disque n°9 de Georges Brassens : la supplique, le fantôme, la fessée …
Madrigaux guerriers et amoureux de Claudio Monteverdi
Mama Rose de Archie Shepp
Desire de Bob Dylan
Une oreille dans le dos de Bernard Haillant
Léo Ferré chante Aragon
Atahualpa Yupanqui (n’importe quel disque)
American Beauty de Grateful Dead
Le Requiem de Jean Gilles
Jean-Sébastien Bach (un disque à piocher au hasard)

Il m’est venu spontanément 11 noms sans réfléchir. Il n’y a pas de règle en fait, on peut ne mettre que deux disques ou au contraire vingt. Faire une liste brute telle que je l’ai faite ou au contraire amener quelques précisions sur les raisons de ces choix (pourquoi telle musique vous touche …).

Les discussions risquent peut-être de durer, surtout si chacun des blogueurs joue le jeu. Cela me laisse le temps d’aller passer quelques jours à Liège en Belgique pour y boire quelques Orval.

Je vous retrouve vendredi soir.

Un art de vivre (1)

LA PETANQUE
Bises et poignées de mains. Rencontres entre amis. Boules qui claquent. Concentration. Détente. Elégance du geste. Plaisanteries fines. Blagues à la con. Sourires en coin. Regards complices. Fair play. Joëlle qui passe à vélo. Petite bière. Prêts pour la revanche. 12 à 12 : le coeur qui palpite. Emotion. Passants qu’on salue. Joëlle qui repasse à vélo. Le jour qui s’éteint. Oiseaux qui chantent. Légèreté de l’air. Re-petite bière. Re-bises et re-poignées de mains.

La pétanque est assurément un Art de Vivre.

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Salade de Bordeaux

Ce matin, je me suis rendu compte que j’avais des tas de replants de salades à donner. Il s’agit de la Merveille d’hiver, une variété que l’on sème au début septembre et qui va donner de belles salades pommées en début de printemps. La Merveille d’hiver est précieuse car elle est l’un des premiers légumes de l’année que l’on consomme.

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Dans mon jardin, il y a aussi en ce moment une autre variété que j’ai découverte depuis peu et qui est l’une des plus intéressantes : la Cornet de Bordeaux qui gèle plus difficilement que les autres scaroles et qui arrive parfois à passer l’hiver. On peut donc, si l’hiver est doux comme l’an passé, consommer la Cornet de Bordeaux pendant toute la période hivernale. Là aussi, je peux donner des replants qui sont à repiquer en pleine terre.

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En revenant du jardin (qui est en plein champ), je suis passé chez mes parents. La télé était allumée. Drôle de hasard : devinez-qui il y avait sur l’écran : l’Encorné de Bordeaux (vous avez sûrement reconnu là notre ancien ministre bordelais, cocufié par ses propres électeurs et qui a décidé de se représenter aux prochaines élections locales). Et qu’était-il en train de vendre aux téléspectateurs ? Sa salade ! En promettant quoi ? Monts et Merveilles divers

Le discret accenteur mouchet

LES OISEAUX DE L’HIVER (3)
Comme je l’ai déjà écrit sur ce blog, l’hiver est pour moi la saison la plus animée. Partout autour de la maison, des oiseaux volent et font d’incessantes allées-et-venues entre les arbres proches et la mangeoire sur le rebord de la fenêtre. Je n’ai jamais eu la moindre lassitude à les observer.

Tous les oiseaux qui viennent à cette auberge improvisée sont des oiseaux plutôt bien connus du public : mésanges, rouge-gorges, verdiers, chardonnerets … Mais il en est un qui échappe généralement à l’observation, c’est l’accenteur mouchet. Si l’on n’y fait attention, on ne le remarquera même pas, l’oeil ayant vite fait de qualifier de « moineau » tout oiseau qui n’affiche pas des couleurs vives. Et c’est vrai que le plumage de l’accenteur ne brille pas par son éclat. L’observateur attentif aura cependant remarqué que le bec n’est pas fort comme celui d’un moineau mais au contraire fin comme celui de tout oiseau insectivore qui se respecte.

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Depuis le printemps dernier, l’accenteur est devenu presque inexistant autour de la maison. Mais je sais qu’il est là. Il m’arrive parfois d’entendre son faible chant (de plus en plus indaudible pour mes oreilles de vieux) dans les buissons en contrebas de la route en face de chez moi. Mais depuis quelques jours il sort un peu de sa réserve, l’arrivée des mauvais jours le pousse à rechercher un peu plus de nourriture. Alors timidement, il vient dans le pyrracantha devant la fenêtre. Il ne s’aventure alors que très peu à découvert, ne restant que de courts instants à l’écart des buissons.

Je ne sais pas qui lui a donné ce nom peu compréhensible d’accenteur mouchet. Probablement un mec qui s’emmerdait dans un grenier poussiéreux du muséum d’histoire naturelle et qui a voulu laisser une trace de son pauvre passage sur terre à la postérité. Autrefois, l’accenteur était appelé le « traîne buisson », surnom qui lui allait plutôt bien et qui suppose de fortes capacités d’observation de notre bon vieux peuple). Car cet oiseau est un modeste, un « gagne-petit » qui passe son temps à glaner quelques débris de nourriture au ras du sol, notamment des restes de graines que d’autres oiseaux laissent parfois tomber au sol (il devient en partie « mangeur de graines » pendant la période hivernale).

Je me rappelle que le chanteur Pierre Louki aimait les ânes et disait que pour lui « l’âne est un cheval qui n’a pas réussi ». Pour la même raison, j’aime ce modeste oiseau qui aurait pu devenir moineau. Modeste par son plumage. Modeste par son chant. Modeste de son mode de vie. Un vrai modeste quoi !

Grands bluesmen (2)

WILLIE DIXON
Personnage hors du commun, Willie Dixon est l’un des plus grands noms du blues. Son parcours est étonnant. D’abord obligé de fuir la justice et de quitter précipitamment en stop l’Etat du Mississippi, Willie Dixon devient boxeur et gagne en 1936 le titre Golden Gloves dans la catégorie poids lourds. Résistant ensuite à un recrutement pour venir combattre en Europe pendant la seconde guerre mondiale, il se retrouve en prison. Au sortir de la guerre, il retrouve son professeur de contrebasse et fondera avec lui son premier groupe de blues. Il deviendra vite le pillier du célèbre label de disques Chess Records, occupant dans cette maison les fonctions de contrebassiste, producteur, arrangeur et musicien de studio. Il accompagnera les plus grands de la scène blues : Muddy Waters, Bo Diddley, Howlin’ Wolf, Otis Rush, Sonny Boy Williamson et collaborera avec les grands musiciens blancs des années 60 et 70 : Yardbirds, Grateful Dead, Rolling Stones, Van Morrison, Eric Clapton, Led Zeepelin … Miné par le diabète, sa fin de vie sera difficile et il mourra en 1992 peu de temps après l’amputation d’une jambe.

L’enregistrement que je vous propose date de 1962. Il s’agit de I’m nervous (« je suis nerveux »).

Un simple accident de plus

Quatre matins par semaine, je me rends à mon travail en prenant une petite route tranquille qui longe la rive droite de la vallée de l’Ognon. Un matin sur deux en moyenne, il y a des fous du volant qui me doublent à toute berzingue. Je roule pourtant à une vitesse que je considère normale. Le soir, je refais le chemin en sens inverse et il ne m’arrive alors jamais d’être doublé. Pendant longtemps j’ai émis l’hypothèse bizarre que les gens étaient plus pressés d’aller au boulot (le matin) que de rentrer chez eux (le soir). Hypothèse bizarre à laquelle je ne trouvais aucune explication rationnelle jusqu’au jour où je me suis rendu compte de ma mégarde. J’ai enfin compris que si certaines personnes roulent très vite le matin, c’est avant tout parce qu’elles ne sont pas en avance pour aller au boulot. Car effectivement une partie non négligeable de nos concitoyens fonctionne en permanence dans l’urgence et se fait comme règle de vie d’être toujours en retard. En retard au travail, en retard au spectacle, en retard chez le dentiste, en retard chez les amis, …

Il y a un an environ, alors que Joëlle et moi allions arriver à notre travail vers 7H30 du matin, juste avant le village de Brussey, une voiture nous attendait, enroulée autour d’un arbre. Dedans, un type quelque peu dans le cirage. Le conducteur avait pris un virage à toute allure par temps de fort brouillard. Probablement que ce type garde encore des séquelles de cet accident. Je me rappelle avoir inventé une petite maxime pour la circonstance : « Brouillard à couper au couteau, voiture à découper au chalumeau ». Mais il y a plein de phrases de ce genre, de très mauvais goût, que je garde pour moi et que je n’ose pas mettre en ligne sur ce blog. Enfin, voilà qui est quand même fait !

Lundi matin, alors que je me rendais à mon travail, toujours à la même heure (il faisait encore nuit), une masse blanche et noire s’est soudain trouvée devant moi au milieu de la route. Très vite j’ai reconnu une voiture couchée sur le flanc au milieu de la chaussée. Ne voyant d’abord aucun signe de présence sur le lieu, j’ai crû d’abord qu’il s’agissait d’un accident arrivé dans la nuit. Et puis, en passant au niveau de la voiture, j’ai vu une jeune dame qui essayait péniblement de sortir du véhicule, un téléphone protable contre l’oreille (elle avait eu le temps d’appeler son ami). J’étais le premier à passer sur le lieu de l’accident. Il y avait eu plus de peur que de mal, le véhicule était foutu mais la victime heureusement saine et sauve. Deux autres véhicules se sont ensuite arrêtés et nous avons réussi, à trois, à faire sortir la passagère. Quelques minutes plus tard, l’ami de la jeune femme est arrivé « à fond les gamelles ». Pendant cinq secondes, il a serré la conductrice dans ses bras, rassuré qu’elle soit saine et sauve. Nous avons péniblement remis la voiture sur ses quatres roues. Au moment de partir, alors que je remontais dans mon véhicule, j’ai entendu quelques bribes d’une conversation un peu dure. Le mec en question reprochait déjà à son amie d’avoir bousillé la bagnole. A sa place j’aurais été content de serrer entre mes bras quelqu’un de bien vivant.

Et finalement, j’en reviens à mon hypothèse absurde de départ : « Et si certain(e)s, avec de tels conjoints, n’étaient pas vraiment pressés de rentrer à la maison le soir ? Et content(e)s d’en repartir vite le matin ? »

Cuisiner la courge Jack Be Little

Jack Be Little (appelée aussi Mini Jack Be) est l’une des variétés de courges les plus typiques. Elle est facilement reconnaissable à sa petite taille, sa forme aplatie, côtelée et sa belle couleur orangée. D’un point de vue gustatif, elle est, à mon avis, l’une des meilleures de cette immense famille qu’est le monde des courges et des potirons (j’ai déjà cultivé près d’une centaine de variétés, sans compter les variétés décoratives, et je suis loin je pense d’en avoir fait le tour).

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La culture de Jack Be Little est aussi facile que celle des autres courges. Il suffit de semer des graines directement en terre première quinzaine de mai. Chaque pied donne plusieurs dizaines de petits fruits, parfoir une cinquantaine.

Si la pomme d’or, qui lui ressemble un peu, a un goût d’artichaut, Jack Be Little a une saveur qui tire plutôt sur la châtaigne. Il y a certainement plusieurs manières de la cuisiner. En voici une que j’ai trouvée sympa.

Faire cuire les courges entières une dizaine de minutes, sans les éplucher, dans de l’eau bouillante. Prendre ensuite les petites courges et couper le chapeau (comme on le ferait avec une tomate que l’on va farcir). Avec une petite cuiller, évider les pépins et laisser la chair. Remplir la cavité ainsi obtenue d’un mélange de comté, de crème et de lardons (qu’on aura, de préférence, fait revenir légèrement dans une poêle au préalable). On pourrait probablement, sur le même principe, remplacer la garniture par des champignons et de la crème par exemple, ou d’autres choses encore, mais je n’ai jamais essayé … et puis on est en Franche-Comté, donc pas question de se passer de notre célèbre fromage. Mettre les courges dans un plat avec leur chapeau et faire cuire environ 40 mn au four à 220°C. En entrée, quand on a des invités, c’est plutôt assez classe !

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Bon appétit !