Je suis non fumeur depuis longtemps. Cela fait au moins quinze ans que j’ai arrêté le tabac. La nouvelle loi sur l’interdiction de fumer dans les bars devrait, en toute logique, plutôt me convenir. Mais je n’ai pas envie de hurler avec les loups et les censeurs. Car, je dois l’avouer, cette nouvelle loi me gonfle.
Depuis dix ans, vingt peut-être, les fumeurs ont fait d’énormes efforts. Sur les lieux de travail, il n’y a plus un seul bureau où l’on fume. Je me rappelle de salles de réunion enfumées, elles font désormais partie du passé. Notre société a culpabilisé les fumeurs et ceux-ci ont plutôt bien joué le jeu (sauf, il est vrai, à leur domicile où bon nombre de fumeurs, sous prétexte de « c’est ma vie privée ! », continuent de faire subir à leurs enfants les conséquences désastreuses de leur tabagisme).
Il me semble que l’évolution de notre société, ces dernières années, allait plutôt d’elle-même dans le sens d’une disparition rapide de la consommation de tabac dans les lieux publics. Face aux consommateurs de tabac, déjà fortement mix à l’index et qui avaient accepté beaucoup de restrictions sans trop rechigner, il était inutile, à mon avis, que le législateur en rajoute une couche. Il suffisait juste de laisser faire le mouvement qui était initié et qui était en marche rapide.
Bien sûr, les fumeurs ont, pour la plupart, déjà accepté la chose et cette loi va être plus indolore qu’il n’y paraît à première vue. Bien sûr, le législateur surfe sur une opinion publique très favorable à cette mesure. Bien sûr, cette loi va contribuer à combattre ce fléau qu’est le tabac. Bien sûr, les serveuses des bars vont voir leur espérance de vie grimper. Bien sûr, c’était anormal que les fumeurs infligent leur poison à leurs voisins de bars. Bien sûr, les arguments des non fumeurs sont imparables. Bien sûr, bien sûr …
Mais bon, c’est une petite liberté de plus qui fout le camp. Et au bénéfice de quoi ? D’une société de plus en plus aseptique, uniformisée, de plus en plus politiquement correcte. Il est indéniable que cette loi est dans ce nouvel air du temps. Mais les cafés n’étaient-ils pas, à cet égard, des petites poches de résistance ?