C’est à grands coups de klaxons qu’on nous a annoncé la semaine dernière un bonus-malus écologique applicable lors de l’achat d’un véhicule. Les termes choisis lors de cette annonce ne sont pas anodins. On nous parle ainsi de bonus pour les véhicules propres. Or, une voiture sera toujours sale par définition. Mais jamais propre, juste moins polluante. Ce n’est pas en employant ce terme de véhicule propre qu’on contribuera à changer notre attitude vis à vis de ce fléau qu’est la bagnole, le terme va juste permettre à des millions de conducteurs de se dédouaner par rapport à ce problème (voiture propre = conscience propre).
Par ailleurs, j’ai entendu aux infos à la radio que le gouvernement espère bien que ce sera une opération blanche d’un point de vue financier. Car ce sont les taxes payées par les propriétaires de 4X4 et de grosses cylindrées qui serviront à payer les primes allouées aux propriétaires de petites bagnoles. Oui oui, vous avez bien entendu. En d’autres termes, il est vital de continuer à acheter des grosses voitures polluantes pour financer la politique de réduction des pollutions voulue par le gouvernement. Si vous avez compris la logique, expliquez-moi … !
Vous savez, je travaille à la requalification d’un site industriel en parc urbain d’activités; on a uen centaine d’entreprises et 7500 salariés. Et depuis deux ans, on les amène doucement à limiter leur utilisation de la voiture, d’abord on restreignant l’accès aux rues intérieures du site et en construisant des parkings périphériques, ensuite en réorganisant le réseau de transports en commun de façon à ce que le site soit régulièrement desservi (3 arrêts, fréquence de 10 minutes), qu’on double aujourd’hiu même par la signature d’accords publics-privés avec les entreprises pour offrir la gratuité des transports en commun aux salariés du site, et enfin, par la mise à disposition d’une plateforme intranet de co-voiturage… franchement, on peut faire mieux ?
ben à chaque fois queje mets les pieds là bas, je me fais étriper !!!! On dirait que j’ai pris en otage leurs pères et mères !!!! Mais d’où vient cette étrange relation à la voiture en France ??? Qu’est-ce qu’elle représente à part ce symbole évident de richesse et un vague sentiment de pouvoir ? D’où vient que les français ont perdu l’usage de leurs pieds ?
D’ailleurs, il est l’heure… j’y vais !
Je travaille à quinze minutes seulement de mon travail. J’adore faire une pause le midi (d’autant plus que je travaille tôt le matin). Quoi de plus tentant que de rentrer chez moi et m’écouter un petit disque le temps de déjeuner. Mais, même si deux fois un quart d’heure de voiture, c’est vite fait, ça représente quand même trente kilomètres en plus chaque jour. J’ai fait ces aller-retour pendant cinq ans, au moins trois fois par semaine. Devant l’absurdité de la chose, j’ai décidé de manger sur mon lieu de travail. Cela fait cinq mois que je ne rentre plus pour déjeuner (sauf en de rares exceptions). C’est dur, mais l’habitude commence d’être bien ancrée. Cela fera, au bout d’un an, cinq mille kilomètres de moins. Je suis sur la bonne voie. Prochaine étape : une voiture seulement à la maison !
Tu as raison Bernard, quand tu parles de bonne conscience.
C’est, en gros, ce qui distingue les « décroissants » de ceux qui soutiennent le « développement durable ». En développant des solutions moins polluantes et qu’on appelle >propres, on permet à un nouveau marché de se développer. Le green business. Les acteurs de ce marché défendent à fond le développement durable. De nouveau débouchés pour de nouveau produits. Consommez, consommez, consommez encore, puisque ça ne pollue plus.
Un cautère sur une jambe de bois.
La mesure sur les bonus-malus écologiques est en effet conditionnée par le fait que certains achèterons encore des voitures plus polluantes. Elle ne peut être envisagée à long terme et les montants des bonus et malus devront être réajustés en fonction des ventes réelles pour équilibrer les comptes. On n’est pas capable de savoir s’il n’y aura pas d’effet pervers du type « je vais me dépêcher d’acheter ce gros 4X4 parce que le malus risque d’augmenter rapidement si tous les autres (cons) achètent des voitures propres ».
Le fait que la mesure ne s’applique qu’aux voitures neuves a pour but de doper le marché automobile. Or, même en achetant une voiture moins polluante pour en remplacer une ancienne plus polluante, connaît-on le bilan écologique de l’opération ? Au bout de combien de temps l’énergie et la pollution économisées seront supérieures à l’énergie et la pollution nécessaires à la fabrication de la nouvelle voiture ?
La voiture n’est pas seulement perçue comme un signe extérieur de richesse ou de pouvoir. Elle symbolise aussi la liberté individuelle.
En ne rentrant plus déjeuner chez lui, Bernard accepte de perdre une petite partie de cette liberté.
En pratiquant le co-voiturage avec mes collègues, j’accepte de conformer mes horaires à ceux des autres et de perdre environ 45 minutes supplémentaires par jour.
Ce sont des choix, motivés par une conscience aiguë de la pollution .
Mais, je pense l’avoir déjà dit sur ce blog, mes collègues n’ont fini par accepter l’idée du co-voiturage que quand l’essence est devenue beaucoup plus chère.
La foi de notre culture en la science et ses progrès fait des ravages. La grande majorité des gens pense qu’une solution technique va être trouvée pour nous permettre de continuer à nous déplacer autant (plus) qu’à présent, en ne polluant plus et grâce à une nouvelle forme d’énergie que des professeurs Nimbus vont tirer d’un chapeau. Et ce ne sont pas les acteurs du green business qui vont la contredire…
Je n’avais pas pensé aux effets pervers que tu cites, Anne. Cette loi est vraiment tordue et le législateur est peut-être machiavélique.
Bien sur, lorsque l’on voit que la seule mesure qui est retirée du grenèle de l’environnement est purement et simplement destinée à doper le marché français de l’auto, c’est quand même un peu désolant…
Le bilan écologique du changement de voiture pour une voiture neuve moins polluante est évidement très négatif, j’avoue que je n’ai pas de chiffres précis mais ça me semble plutôt évident. Encore que si on se limite aux gaz à effet de serre c’est peut être plus mitigé mais je n’en suis pas sur. Peugeot faisait d’ailleurs une pub qui développait clairement le message « sauver la nature : acheter un voiture ! » Même si ce joli slogan est de moi, c’est une honte.
Pour l’effet pervers de la taxe à bilan nul, il n’est pas si évident. Personnellement je préfèrerais que l’on interdise purement et simplement l’immatriculation des grosses cylindrées puisqu’il n’y a pas de raison qu’il soit possible de payer pour pouvoir bousiller la planète à son grès. Mais il n’y a aucune raison de voir la barre séparant le véhicule dit « propre » du véhicule « sale » comme une limite statique inrévisable. Si on la place à la moyenne des ventes par exemple on privilégie ceux qui achètent un véhicule moins sale que la moyenne et à l’opposé on pénalise ceux qui en achètent un plus sale. Construit de cette façon la taxe à beau être à bilan nul, elle reste une incitation aux choix du moins polluant. Et surtout, il n’est nul besoin de 4×4 pour la financer.
Pour la réaction « vite allons acheter un 4×4 » c’est possible mais ce serait très ponctuel et sans doute plutôt insignifiant.
Cette taxe n’est pas vraiment nouvelle en fait dans l’idée puisque elle avait déjà été mise en avant il y a qq années (qq c’est qqch comme 3 ou 4), je me souvient qu’il en avait été question et que cherchant plus tard comment elle s’appliquait je m’étais rendu compte que le projet était finalement tombé à l’eau.
Pour moi la taxe n’est pas stupide en elle même mais la publicité sur le thème « vite changez de voiture vous polluez avec vos vieux tacots » est absolument scandaleuse. Et bien sur il va falloir voir comment l’initiative est soutenue par la suite puisque ça ne peut pas être viable si les niveaux de pollutions ne sont pas réajustés régulièrement.
J’ai peur de ne pas comprendre ce dont tu parles Anne lorsque tu surlignes le mot développement plus haut, le développement n’a jamais été un problème ! J’ai peur que tu identifies recherche du développement et productivisme, ou même recherche de croissance, ce serait plutôt gênant.
Pour moi la décroissance, elle s’impose par secteurs. Pour ce qui est des transports aériens, poids lourds, … c’est une évidence puisque l’on est encore à bien des années de l’avion propre. Mais elle ne s’impose pas du tout dans la plus part des services. L’éducation ne doit pas avoir d’objectif de décroissance, … Alors ce n’est surtout pas incompatible avec le développement. Pas même avec la croissance en fait, bien qu’elle ne représente alors rien en terme de développement.
Je crois qu’il y a effectivement un amalgame entre développement et croissance, au sens croissance du PIB, mais ce n’est pas moi qui le fais, c’est l’ensemble de la classe politique (et la majorité des journalistes).
Quand on parle de pays en voie de développement, ne parle-t-on pas de pays qui augmentent leur PIB ?
C’est l’effet pervers de l’expression développement durable dont Paul Aries dit que c’est un oxymore (Figure de style qui réunit deux mots en apparence contradictoires).
Quand on parle de décroissance, il s’agit bien aussi de décroissance du PIB et de remise en cause du système productiviste et consumériste.
C’est parce que l’économie prime avant tout dans notre société que le terme de développement a aujourd’hui cette connotation.
C’est évident que beaucoup associent étroitement le développement à la croissance du PIB mais en général c’est bien un objectif de croissance qui est affiché et pas de développement.
Pour ce qui est des pays en développement, je ne pense pas qu’il s’agisse uniquement d’un critère de PIB, je n’ai pas trouvé de définition fiable mais comme c’est issu d’un classement de l’ONU, il est plus que probable que l’IDH avec toutes ces limites soit pris en considération.
Je n’ai pas lu Paul Aries mais pour moi l’expression « développement durable » relève plus du pléonasme que de l’oxymore …
Je sais bien que la décroissance est celle du PIB mais je ne vois pas en quoi elle se justifierait de façon globale. On peut envisager un modèle où l’on n’évalue plus chaque action par sa « valeur marchande » mais alors même la décroissance n’a plus lieu d’être. Sinon pour prendre un exemple précis, dans le calcul du PIB, la production de l’administration publique est identifiée à son cout. Est ce que dans un objectif de décroissance il faut faire disparaitre l’administration publique ?
L’objectif de développement est économique bien au delà du simple « développement économique » ne serait ce que parce qu’il dépend largement de la distribution et de l’utilisation des ressources. Mais là encore il ne faut pas penser la science économique comme asservie à la croissance du PIB.
Voila les objectifs de développement pour 2015 mis en avant par l’ONU avec les indicateurs correspondants : http://millenniumindicators.un.org/unsd/mifre/mi_goals.asp
« D’où vient cette étrange relation à la voiture ? », demandait Oups.
De nombreuses réponses ont déjà été justement apportées : le gain de temps, le sentiment le liberté, le symbole de richesse, etc…
Je me permets d’ajouter un élément qui entre à mon sens fortement en ligne de compte mais qui est rarement évoqué : un habitacle clos, chaud, douillet, une posture imposée proche de celle du foetus, nul doute qu’un conducteur de voiture retrouve d’anciennes sensations auxquelles il tient d’autant plus qu’il n’a pas envie, une fois de plus, de les perdre !!!
Sinon, Bernard, si tu allais au boulot carrément à vélo, ça te prendrait combien de temps ?
Dans la série « comportement étrange avec la voiture » :
Comment expliquer que les acheteurs (notamment français) s’obstinent à préférer les voitures à changement de vitesse au plancher et ont ainsi fait échouer toutes les tentatives de passer le levier au volant (comme c’est depuis des années le cas pour les pilotes de rallye) ou de développer (comme aux USA) les changements de vitesse automatiques (plus confortables, voire même écologiques) ?
C’est comme les oeufs : on ne sait pas pourquoi, mais les Français refusent obstinément d’acheter des oeufs de poules à coquille blanche et jaune « naturellement » moins jaune.
Pour les oeufs, je ne sais pas, mais pour les automobiles, j’ai bien ma petite hypothèse :
…parce que les Français sont tous des branleurs !
Vincent, je ne sais pas combien je mettrais de temps pour aller au boulot. Mais trente deux kilomètres aller-retour, ça me semble difficile … Et puis la route me semble hyper dangereuse avec des gens qui roulent comme des sonnés.
Sans EPO, oui, ça fait un peu long, mais sinon…
Ok pour tous les effets pervers repérés mais connaissez-vous sur le sujet une mesure qui en serait dénuée ? Que feriez-vous si vous étiez aux commandes de l’état ?
(Est-il besoin de préciser que c’est une « vraie » question ?)
Ce serait quoi, sincèrement, la mesure urgente à prendre ?
Mettre un malus à tous les automobilistes, sans distinction ? Ou plutôt augmenter considérablement le prix de l’essence (selon le principe du « pollueur/payeur ») ? C’est bien ça ?
Mais comment ? Du jour au lendemain ? Pour tout le monde pareil ?
Quelqu’un peut-il éclairer ma chandelle ?
(Je n’ai pas particulièrement approfondi la question mais suis intéressé par le sujet).
Ouhou ! Y’a quelqu’un ?
C’est amusant (attendrissant même), Vincent, de te voir encore poser des questions à l’assemblée en espérant qu’on te réponde.
T’as pas remarqué que depuis plusieurs mois, plus personne (ou presque) ne veux causer avec toi ? (T’avais qu’à pas « chercher » aussi !).
Pourquoi t’insistes encore ?
Moi j’ai rien cherché, et on ne répond pas plus à mes questions, quand j’en pose, hein…. Chacun sa croix Vincent !
eh ! oh ! vous plaignez pas les mecs ! : moi me suis débattu avec mon bescherelle et mon bled pour écrire des beaux poèmes, dans un autre article, et pas un bravo, pas un encouragement, rien ! (pourtant ils sont super beaux !)
En tous cas, moi je l’ai souvent dit déjà : si j’étais élue, j’interdirais la circulation intra urbaine. Ce serait tout bonnement illégal ! Les gens devraient tous laisser leurs voitures dasn des parkings périphériques étudiés pour. Et j’intensifierais le réseau de transports en commun, probablement avec un système de tramways.
Seuls autorisés à circuler en ville : les services d’urgence : pompiers, ambulances. Des bornes amovibles s’abaisseraient pour les laisser passer.
La police peut bien circuler en vélo.
walà.
et rien à foutre d’être impopulaire !
L’idée n’est pas idiote (pas sûr même qu’elle soit si impopulaire que tu crois), mais le problème majeur que je pressens est que les villes ne sont pas (encore ?) équipées en parking ni transports collectifs adaptés. Ne faut-il pas auparavant réaliser ces équipements ? Y’a-til simplement les espaces nécessaires ? (vu la pression immobilière dans certaines ceintures urbaines)
Et puis surtout : quel impact réel cela aurait-il sur la consommation de pétrole ? N’est-ce pas une mesure qui relève davantage de la simple « qualité de vie » que de la surconsommation des énergies fossiles et de la pollution qui s’en suit ? (Quelqu’un connaît-il la part des transports individuels urbains dans la consommation globale ?)
Y’a pas des spécialistes (ou plutôt des blogueurs lecteurs d’ouvrages récents traitant de la question) qui pourraient nous aider à réfléchir ?
on peut réaliser ces équipements simultanément avec la réorganisation intérieure. Viens faire un tour à Belfort, je t’emmènerai visiter l’expérience réussie sur 150 ha, et 7500 « habitants ».*
il y a des mauvaises langues qui se sont moquées éhontément de l’importance donnée aux « parkings », dans notre communication… je ne citerai personne, mais c’est être bien inconscient de l’impact que ça peut avoir…
Un article qui présente la pollution des villes dans le monde :
http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2016/05/12/quelles-sont-les-villes-les-plus-polluees-du-monde_4918199_4355770.html
ça va, on a encore de la marge pour rattraper la Chine et le Pakistan …