Il y a eu une petite discussion un peu musclée sur ce blog à propos des sportifs, suite à un commentaire dans lequel je disais grosso modo que le sport professionnel n’a aucune valeur significative s’il n’est pas le reflet d’une vie sportive à la base et qu’un pays dans lequel les enfants ne jouent pas au ballon (dans la rue ou ailleurs) n’a pas beaucoup de légitimité pour gagner une coupe du monde. Et j’ai ajouté que si les pays africains nous fournissent en joueurs d’exception (les meilleurs au monde) ce sont avant tout eux qui méritent de gagner les coupes mondiales. Je ne l’ai pas dit avec ces mots-là mais c’est ce que ça voulait dire. Mais c’est sur le fait que j’aie dit que la pratique sportive diminuait en France que les échanges ont été un peu houleux. Tout ça c’est la vie !
Ce nouvel article, que je mets en ligne ce soir, va dans le même sens mais pour un domaine complètement différent : la culture. Mais la comparaison entre sport et culture s’arrête-là car s’il n’y a plus beaucoup de jeunes qui jouent au ballon, il y en a beaucoup qui jouent d’un instrument de musique et le nombre de personnes ayant appris à jouer à un moment ou à un autre d’un instrument est de plus de 20 millions dans notre pays. Mais bon, je ne voudrais pas réduire le sens de mon propos à la musique qui n’est qu’un aspect particulier de la culture.
Notre vie culturelle en France, ce n’est pas le monde des grands artistes professionnels (aussi excellents soient-ils d’ailleurs) mais avant tout le monde des petits artistes qui font vivre au quotidien la musique, la poésie, l’art en général. Et le secteur où j’habite vit, d’un point de vue culturel, grâce à un réseau non seulement d’artistes (amateurs ou professionnels « gagne-petits » qui n’arrivent pas forcément à obtenir le statut d’intermittents du spectale) mais aussi grâce à des structures associatives tenues par des poignées de bénévoles (exemple du Comité d’animation de Voray, dont je fais modestement partie, qui organise à quelques km de chez moi 4 concerts annuels de qualité exceptionnelle).
Lorsque j’ai écrit mon dernier article, celui sur Doumé, c’est avec la même intention de rendre honneur à ce peuple de fourmis, de petites mains, qui maintiennent vivante une certaine tradition de la chanson. Je pourrais dire la même chose, ou à peu près, si je parlais des groupes qui jouent dans les bars (quelque soit le type de musiqsue) ou des chorales qui contribuent à maintenir vivante la transmission de la musique.
La musique ne peut pas aujourd’hui se résumer à des vidéos qu’on regarde sur youtube ou des disques qu’on écoute sur les sites de streaming (tout comme on ne peut réduire la littérature d’aujourd’hui aux derniers Goncourt …). Car ce mode de diffusion, que l’on dit plus moderne, c’est aussi la mort annoncée des artistes (vaste sujet dont on peut discuter). En d’autres termes : le concert vivant avant tout, bordel de m… !
J’en arrive à l’objet de mon article.
Depuis une dizaine d’années, j’ai vu apparaître un phénomène nouveau en Franche-Comté : celui des spectacles à domicile. Peut-être qu’auparavant ça existait ça et là, mais la dynamique de ce genre de spectacle est plutôt récente. Il est bien évident que cela a lieu également dans les autres régions. Mais personne n’en parle (je n’ai jamais vu un seul article sur le sujet dans la presse), alors qu’il s’agit là d’un vrai fait de société, qui donne peut-être même un aperçu de ce que sera une partie de la culture demain. Toujours est-il que depuis une dizaine d’années Joëlle et moi sommes allés dans une dizaine de lieux, souvent chez des amis (Bernard et Brigitte, Thérèse et Jean-Pierre, Monique …). Au total cinq ou six lieux fréquentés régulièrement plus quelques autres. Et nous avons pu y apprécier un large panel de productions artistiques : expos de peinture, chanson française, jazz, flamenco, musique vocale de la Renaissance, musiques expérimentales, poésie, théâtre, … le tout joué aussi bien par des amateurs que des professionnels (d’ailleurs si j’ai pensé à faire cet article c’est grâce à Yves qui a signalé sur ce blog le décès de Morice Benin, et cela m’a rappelé que cet artiste était coutumier des interventions à domicile).
Ce mode de fonctionnement de spectacles « chez les gens » présente plein d’avantages par rapport aux spectacles plus classiques : proximité avec les artistes, très faible coût (souvent juste un « chapeau à la sortie »), public restreint (rarement plus de 30 personnes) et donc beaucoup de convivialité : il y a toujours de bonnes bouteilles à boire, chacun amène souvent un petit plat à partager et l’après-spectacle dure souvent des heures. Et à part les amis qu’on y rencontre, les musiciens qu’on connaît parfois, il y a aussi d’autres personnes qu’on finit par croiser régulièrement et avec qui on noue des relations. Tout ça c’est du bonheur ! Du vrai bonheur !
Le covid a quasiment tué le monde de la culture (c’est sans doute le domaine qui a le plus morflé). Evidemment, les spectacles à domicile ont, eux aussi, énormément souffert de la situation. La culture qui renaîtra dans notre pays aura forcément une autre forme que celle que nous connaissions jusqu’à présent. Peut-être que les spectacles à domicile, qui ont l’avantage de fonctionner avec de toutes petites jauges, ont de l’avenir. Mais avec quels artistes ? Il restera peu d’artistes professionnels. Subsisteront tout de même tous les musiciens et artistes amateurs. ça ne compensera pas la perte mais il faudra bien s’en contenter. Et peut-être que tout va repartir de ce vivier de base. Enfin, on a le droit de rêver …
La petite question que je voudrais poser avec cet article est la suivante : Est-ce que chez vous aussi, dans vos régions respectives, ça fonctionne de cette manière ? Et est-ce que vous sentez que ça pourrait bouger dans ce sens-là ?
Pour terminer cet article, comme j’ai eu l’occasion d’organiser un concert du trio Louki dans la grange désaffectée de mes parents (le 6 septembre 2018), je vais mettre quelques vidéos de mon ami Jean-Pierre qui, accompagné de Pascal et de Philippe, joue régulièrement dans toutes sortes de lieux. Il y récite ou chante quelques textes de Pierre Louki. J’ai trouvé ces vidéos par hasard ce soir (ce sont les seules qui existent a priori), au moment où j’allais mettre mon article en ligne, alors je vous les livre (elles viennent toutes du même concert, je ne sais pas où les vidéos ont été filmées) !
Très intéressant cet article (un peu moins risqué que quand tu parles de foot ou de natation synchronisée). :whistle:
Je connais certains de ces lieux privés, tu le sais bien (merveilleux effectivement), et d’autres aussi avec de petites troupes de théâtreux. J’ai même un voisin qui fait des concerts privés Brassens/Ferrat.
Tout ça pour dire que j’envisage, sérieusement, comme un nabab ou un aristocrate, de recruter des artistes pour des festivités autorisées que j’espère prochaines.
Cela concerne aussi un restaurant voisin où le patron cherche des soirées animées.
Ben lui il est comme nous tous : il attend la vie.
Et j’espère même mieux : que tous les musiciens, les chanteurs, se réunissent comme ça, pour rien, comme on faisait au temps de la veillée.
Une limite pour moi : aimant chanter et jouer de la guitare je suis terrorisé par le public, alors je suis le public.
Donnez-moi vos dates !
Les ricains font beaucoup ça depuis longtemps, notamment pour les scènes rock indépendantes (scène que j’ai suivie mais je suppose que c’est le cas dans tous les genres musicaux). A priori ça semble le seul avenir intéressant à court terme pour la culture en général, des gens qui peuvent s’exprimer tout en cassant la barrière de la « starification » de la scène. Discuter avec son public, manger ensemble, c’est le top (2/3 expériences vécues qui finalement me restent en mémoire alors que pas mal de concerts j’ai zappé…).
Quand tu veux on réhabilite à Bussière pour faire une jolie scène ! :biggrin:
Je développe à peine : non seulement c’est le seul avenir intéressant, mais surtout le plus intègre. Pas besoin d’un directeur des expos pour décider qui ou quoi peut jouer ou s’exposer. Le public sera seul juge, rendons-lui ce pouvoir :devil:
Perfecto !
Dupdup…
Il te reste de la bière ?
:biggrin:
on paye hein, et les artistes aussi, on les veut.
Vivants.
Avoir des artistes à domicile , lorsque j’étais gamin au début des années 70 , c’était quelque chose de commun à la ferme de mes grands-parents . Toutes les fins de travaux agricoles ( moissons , ramassages de patates , abatage d’un porc … ) étaient clôturées par un Fest-noz sous le hangar . Bon , c’est vrai , il n’y avait que rarement des instruments de musique … Juste des voix qui reprenaient des chants d’un autre age et les chanteurs qui tapaient du pied pour donner la cadence aux danseurs … Le kan ha diskan . Tout cela a été perdu avec le temps qui passe , mais certaines mélodies au milieu des odeurs de crêpes de far breton , restent gravées au fond de ma mémoire …
Rien de tel ici, aucun souvenir de ce genre.
Je me demande souvent pourquoi il n’y a quasiment rien en Franche-Comté qui relève de la musique traditionnelle.
Peut-être que la première guerre atroce que mena la France pour conquérir la Franche-Comté y est pour quelque chose. Les deux tiers des Franc-comtois sont morts pendant ce triste épisode. Et sans doute que toutes les choses vivantes de la tradition ont disparu dans ce chaos. Enfin je n’en sais rien, je n’ai rien lu sur le sujet, je me demande juste pourquoi … Quelqu’un sur ce blog aurait un élément de réponse ?
Pour mesurer l’ampleur de cette première guerre qui se prolongera plus tard par la défaite de la Franche-Comté en 1678 :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guerre_de_Dix_Ans_(Franche-Comt%C3%A9)
D’un sens c’est cool il y a toute une musique franc comtoise à créer ! :wub:
Pas d’historique à proposer mais je peux garantir que la génération de mon père (né en 1932) était une génération chantante. La famille de ce côté est frontalière et sociable, et je revois encore un de mes arrières grands-oncles tripotant une guitare électrique pour assurer un rock’n roll tout à fait bluffant devant l’assemblée familiale reconnaissante, avec un arrière-petit-fils à la batterie. Une claque dans ma gueule. C’est là un terroir tout à fait particulier où tous les hommes chantent spontanément un même répertoire partagé, et avec le sourire aux lèvres. Ils faisaient la fête, chantaient, dansaient et parlaient et les femmes suivaient chantant parfois. Je revois ça à chaque enterrement, sauf que ça ne chante plus.
Les anciens pratiquaient encore le patois franc-comtois et quelques expressions étaient encore parlées dans les générations suivantes, mais c’était mort ou moribond, je n’en conserve que quelques magnifiques expressions (il s’est réveillé mort, etc.). Il en reste des traces grâce à un journal incroyable, la racontotte. parmi d’autres choses.
J’ai compris bien tard que ces personnes étaient les dernières et qu’il y avait un matinage franco-suisse pas forcément très simple à identifier. D’ailleurs mon père youdlait très bien et je sais que mes origines sont en partie hélvètes et même plus lointaines, j’ai une généalogie qui remonte à la renaissance au moins, m’y intéresse fort peu au demeurant, car ma mère ne venait pas de là et que ça part dans tous les sens. Pas prêt pour un génôme !
La tradition est plutôt orale chez les déracinés et les montagnards.
Une des chansons traditionnelles était le ranz des vaches que mon père chantait fort bien.
Jacqueline ! Tu connais ?
Eh oui, il s’agit d’un endroit proche du clos du Doubs, un endroit que peu de gens connaissent, voisin des franches montagnes suisses avec un passé médiéval magnifiquement visible à Saignelégier.
Un truc incroyable dans ce secteur : des moulins souterrains… A découvrir vous dis-je.
Ranz des vaches
A 3’38, c’est peut-être bien de ma famille, il a les mêmes larmes.
bien sûr, toute la suisse connaît le ranz des vaches.
Saignelégier, c’est une magnifique localité médiévale, baignée par le Doubs
les moulins sous-terrains, je pense qu’il s’agit de ceux du Col des Roches, frontière franco-suisse, ou alors les grottes de l’asphalte à Travers canton de Neuchâtel.
je suis née la même année que ton papa.
bisous
pour Christophe, j’ai confondu Saignelégier et Saint-Ursanne
bonne nuit et bon dimanche
Oui bien sûr c’est Saint-Ursanne !
Ma famille paternelle est originaire de Indevillers et Saint-Hippolyte dans le Doubs mais bien avant c’était Muriaux en Suisse, pas si loin…
Ah ces frontières !
Saignelégier, je ne connais pas du tout.
Muriaux non plus
bonne fin de dimanche très pluvieux.
bonsoir, bonsoir, y a plus personne sur ce blog……………
ah, mais j’y pense, hier Bernard m’a dit qu’il allait brasser de la bière, alors je comprends
alors dormez bien les amis.