– Dis tonton, t’a-t-on dit ce qu’on fit cet été ?
– Non Titi, t’as pas dit, tu vas me raconter.
– On a beaucoup trotté, on a été partout.
– Bien Titi, en été il faut tâter à tout.
– Oh, on a tout tâté, tonton, tout cet été
Mais on t’a tu tonton tout ce qu’on a tâté.
-Pourquoi m’avoir tout tu ? Dites sans hésiter
Tout à votre tonton. Qu’avez-vous donc tâté ?
– On te dit tout tonton ce qu’on fit à tâtons ?
…. A tâtons on tâta de tata les tétons.
– Titi, tu peux tâter comm’ ton tonton tâta
Mais c’est laid de tâter les tétons de tata.
– Mais tonton, on a tâté dans l’obscurité,
Oui, tant et tant tâté que c’est sans s’en douter
Que tata on tâta. Faut pas le regretter,
Les tétons de tata se sont laissés tenter.
(Pierre Louki, extrait de « Aneries », éditions Pirot)
Mais dis donc Titi :
« T’as pas, t’as pas, t’as pas tout dit
T’as pas tout dit à ta doudou
T’as des doutes et tu dis pas tout
Et qui c’est qui l’as dans l’dos, toi ! »
Ah ben, c’est malin !
Ca m’a fait penser à Ta Katie t’a quittée et depuis 2 jours, j’ai l’air qui me trotte dans la tête … C’est agaçant !
Effectivement, c’est agaçant un air qui vous trotte dans la tête du matin au soir. Mais mieux vaut encore un air de Lapointe que « la danse des canards », non ?
Car moi, quand ça m’arrive, j’ai forcément droit à cette infâme ritournelle.
Ah, oui, les ritournelles ! Moi, c’est au jardin. En particulier quand je pioche et il faut beaucoup piocher au jardin. Je fredonne tour à tour les oeuvres immortelles suivantes : « L’Internationale », « Le chant des Africains », « La victoire en chantant », et même « Chez nous, soyez Reine ! »…
Tout un répertoire qui vient rythmer les gestes, donner de l’âme au répétitif du travail. Et pour peu, comme hier par exemple, que le temps soit particulièrement clément, l’action accompagnée par le chant me met dans un état de grâce tout proche de la béatitude.
Au fond, les moines avaient tout inventé : le travail peut être une forme de prière. Une prière à l’immanence du sacré quand, comme moi, on ne croit pas plus à Dieu qu’à la poudre de perlimpinpin. Mais qu’on goûte au sacré dans le bon vin l’amour des gens bach mozart proust trchékov la liberté dans la justice et autres gracieusetés du plaisir d’être au monde, vivant.
Ah, j’oublais, la ritournelle absolue, apprise dans mon enfance et que j’ai toujours à deux doigts de la tête, prête à être chantée, et que je fredonne même quand je ne la fredonne pas : :
GARCON, PRENDS LA BARRE
Hé, garçon, prends la barre,
Vire au vent et largue les ris
Le vent te raconte l’histoire
De ces marins couverts de gloire
Il t’appelle, et tu le suis
Vers les rives lointaines
Que tu rêves tant d’explorer
Et qui sont déjà ton domaine,
Va tout droit sans fuir la peine
Et sois fier de naviguer
Sur la mer et sur terre,
Au pays comme à l’étranger,
Marin, sois fidèle à tes frères,
Car tu as promis naguère
De servir et de protéger.
Je ne sais pas de qui c’est, mais ça ressemble fortement à du Louki :
Monsieur Lamère a épousé Mademoiselle Lepère.
De ce mariage, est né un fils aux yeux pers.
Monsieur est le père, Madame est la mère.
Les deux font la paire.
Le père, quoique père, est resté Lamère, mais la mère, avant d’être Lamère était Lepère.
Le père est donc le père sans être Lepère, puisqu’il est Lamère, et la mère est Lamère, bien que née Lepère.
Aucun des deux n’est maire.
N’étant ni le maire ni la mère, le père ne commet donc pas d’impair en signant Lamère.
Le fils aux yeux pers de Lepère deviendra maire.
Il sera le maire Lamère, aux yeux pers, fils de Monsieur Lamère, son père, et de Mademoiselle Lepère, sa mère.
La mère du maire meurt et Lamère, père du maire, la perd.
Aux obsèques, le père de la mère du maire, le grand-père Lepère, vient du bord de mer, et marche de pair avec le maire Lamère, son petit-fils.
Les amis du maire, venus pour la mère, cherchent les Lamère, ne trouvent que le maire et Lepère, père de la mère du maire, venu de la mer, et chacun s’y perd !