L’oiseau-vilebrequin

Ah, ça y est enfin, le rêve de ma vie s’est réalisé !

On m’avait toujours dit que le pic était le meilleur oiseau pour percer des trous dans les arbres. Je le savais certes, mais j’avais toujours dans ma tête une petite réserve. Oui, un pic, qu’il soit pic épeiche ou pic vert, reste – aussi beau soit-il – moins efficace pour percer un arbre qu’un véritable outil vendu par Casto.

Alors, bien qu’étant très peu bricoleur, je me suis mis à la recherche de l’oiseau-outil idéal, celui qui allait laisser sur place tous ses concurrents vendeurs de visseuses, perceuses, foreuses …

En quarante cinq ans, depuis que j’ai commencé à m’intéresser à l’ornitho, j’ai fait des milliers d’heures d’affût. Parfois je croyais l’avoir enfin photographié, mais quand je revenais à la maison et que je faisais développer les photos, il n’y avait rien sur le négatif. Combien de stocks de pellicules gâchés ! N’était-ce là qu’un effet de ma consommation de bière excessive ?

Et puis le temps a passé. Les années, puis les décennies …

Et là, surprise, bien que ma consommation de bière n’ait pas baissé, l’oiseau-vilebrequin, dont je suis le premier à démontrer l’existence, a bel et bien été capté par mon nouvel appareil numérique. Il était perché sur un arbre du quartier (c’est à dire « branché sur le secteur »). La preuve de ce que j’avance :


Il existe même une deuxième espèce d’oiseau vilebrequin que j’ai également réussi à photographier. Cette espèce est encore plus performante en ce qui concerne le nombre de tours par minute !

Evidemment, en tant que découvreur d’une nouvelle espèce, c’est à moi que revient le privilège de donner un nom.

Vous avez envie de m’aider ? Qu’à cela ne tienne ! Quel nom latin donneriez-vous à cet oiseau ?

Si vous êtes la personne qui propose le nom le plus original, je vous offre un nombre d’oiseaux-vilebrequins suffisant pour terminer les travaux de votre maison.

Qu’on se le dise dans les chaumières !

« Les fêlés de la graine » (2)

Dans un précédent article, je vous ai parlé de la constitution d’un groupe local de jardiniers dont le but est de parvenir collectivement à l’autonomie du groupe au niveau des graines potagères.
Comme nous travaillons tous ensemble ce sujet très compliqué (car chaque légume pose un problème particulier), nous mettons en place des outils destinés à aider chacun d’entre nous.
A noter que j’avais également mis en ligne un autre article qui parlait des grands principes de la sélection des graines. Les personnes qui seraient de nouveaux lecteurs sur ce blog auraient intérêt à lire cet article « Graines, Tour de France et Shadoks » avant d’aller plus loin.

Lorsqu’on aborde la production de graines de tel ou tel légume, se posent trois questions essentielles auxquelles on est obligé de répondre :

– La plante est-elle annuelle ou bisannuelle ? La question est importante. Prenons l’exemple de la carotte qui a son cycle de développement sur deux années (et qui est donc bisannuelle). Comment procéder pour faire passer l’hiver aux carottes (plantes gélives) que l’on a sélectionnées pour la production de graines ?  Quelles plantes sélectionner (sachant qu’il ne faut surtout pas sélectionner les plantes inadaptées qui auraient tendance à fleurir dès la première année) ? Le jardinier s’attaque rarement à la production des plantes bisannuelles (les poireaux parfois) car il sait, d’instinct, que c’est beaucoup plus complexe que pour les autres plantes.

– La plante est-elle autogame (c’est à dire en autofécondation) ou allogame (c’est à dire à fécondation croisée) ? C’est là sans doute la plus grande difficulté du sélectionneur car seules les plantes autogames sont faciles à reproduire pour le jardinier. Non seulement toutes les variétés des plantes allogames s’hybrident entre elles (par exemple plusieurs variétés de radis ensemble) mais en plus elles s’hybrident avec leurs homologues sauvages (par exemple le radis avec la ravenelle, la carotte avec la carotte sauvage, la chicorée avec la chicorée sauvage …). Et par ailleurs, il faut savoir que plusieurs légumes, qui semblent d’apparence différente, peuvent appartenir à la même espèce botanique et donc forcément s’hybrider entre eux (exemple des bettes, des poirées à couper, des betteraves rouges et des betteraves fourragères qui ne constituent qu’une seule et même espèce). Vous l’avez compris : si vous vous lancez dans la production de graines, vous ne pourrez cultiver qu’une seule variété (de courge, de chicorée …) et à la condition expresse qu’il n’y ait pas d’autres jardins dans votre secteur. Cela donne l’ampleur du défi que notre groupe de « fêlés de la graine » s’est fixé.

– Enfin, il est important de connaître la durée de vie germinative des graines et d’établir un planning de récoltes des graines. Car nous sommes toujours placés devant plusieurs options. Exemple : les graines de courges musquées ont une durée de vie de cinq ans. Vais-je produire ces graines dans mon jardin tous les ans ou tous les cinq ans ? Dans le premier cas, j’adapte plus vite les graines au changement climatique mais j’augmente de cinq fois les risques d’hybridation fortuites avec d’autres variétés. A chacun d’avoir sa stratégie !

Quand on regarde la complexité du problème, on comprend pourquoi les jardiniers qui produisent leurs propres semences ne le font que pour certains types de légumes très faciles : tomates, poivrons, piments, aubergines, laitues … en général moins d’une dizaine de légumes alors que nos jardins en possèdent parfois une cinquantaine.

Nous avons établi un tableau synthétique qui donne pour chaque légume les trois caractéristiques dont je viens de parler : annuelle ou bisanuelle ? Autofécondation ou fécondation croisée ? Durée de germination des graines ? Avec, en plus, mais ça concerne peu notre problématique de sélectionneur de graines, une colonne indiquant les températures et les temps de germination propre à chaque légume.

La suite de ce tableau en ce qui concerne les plantes aromatiques que nous avons préféré mettre à part :

Et enfin, la liste des plantes que notre groupe reproduira sous d’autres formes que les graines.

A noter que ces tableaux ne sont pas d’une grande netteté, je crois que Photoshop est très performant pour les images mais pas pour le texte, il m’aurait fallu « illustrator » que je ne possède pas. Mais bon, ça reste lisible, et en plus je peux envoyer ces tableaux sous forme pdf et word à ceux qui les voudraient.

Vous avez remarqué dans ce tableau que la grande majorité des plantes est allogame et présente donc plein de risques de fécondation croisée. La grande majorité des légumes est donc difficile a reproduire pour les amateurs que nous sommes. Difficile mais pas impossible.

Il a fallu beaucoup de temps pour faire ce tableau, car on a dû regrouper des choses que l’on trouve très éparpillées dans des bouquins, sur des sites internets, … alors on espère surtout qu’il servira à d’autres (c’est d’ailleurs le but : trouver d’autres Fêlés !).

Notre groupe arrivera-t-il à terme à devenir autonome en ce qui concerne la soixantaine de légumes cités dans les tableaux ci-dessus ? Rien n’est moins sûr. Mais c’est un beau défi, non ?

Populations d’oiseaux en berne !

L’endroit où j’habite est très préservé : forêt derrière la maison, nombreuses haies, végétation diversifiée, peu de cultures aux alentours …

Mais, malgré tout, les populations d’oiseaux baissent au fil des années. Je ne parle pas de la fréquentation du poste de nourrissage en hiver qui a toujours été très fluctuante, mais de la densité d’oiseaux nicheurs à la belle saison.

Quelques exemples :

Le troglodyte ne niche plus autour de la maison depuis trois ou quatre ans.


Je ne vois plus la mésange à longue-queue que certains hivers, et jamais en période de reproduction.

Le pic mar se fait rare, lui aussi ne se manifeste plus qu’en hiver … et encore très rarement !

Même la fauvette à tête noire, encore très nombreuse il y  a quelques années, a vu ses effectifs chuter en 2019.

Mais c’est surtout au niveau des espèces dites « cavernicoles, qui se reproduisaient autrefois dans mes nichoirs, que la population baisse.

Aucune nidification des rouges-queues noirs et à front blanc depuis trois ans.


Aucune reproduction de l’étourneau dans mes nichoirs depuis au moins 10 ans.

Disparition complète du moineau friquet.

Pour la première fois, la sittelle ne s’est pas reproduite autour de la maison en 2019.

Et surtout, disparition complète du torcol qui était en quelque sorte l’espèce la plus emblématique de la maison.

Globalement, le bilan n’est donc pas très rose (mais attention, je ne parle que de la zone qui est directement autour de la maison, pas de ce qui est un peu plus distant).

Et chez vous ?

Manu Dibango

Super concert hier soir à Vesoul de Manu Dibango (qui est un habitué de la scène franc-comtoise).
Sur Youtube, un concert qui est très proche de ce que l’on a pu entendre hier (il s’agit d’ailleurs exactement des mêmes musiciens) :

Bonne écoute à tous !

Le jardinage, étonnamment moderne ?


JARDINER À NOTRE ÉPOQUE, ÇA VEUT DIRE QUOI ?

Drôle de question, non ? Car elle sous-entend que jardiner maintenant, ce n’est pas tout à fait la même chose qu’autrefois.

Effectivement, faire du jardin aujourd’hui ne correspond pas aux mêmes préoccupations qu’auparavant.

Pendant une dizaine de millénaires, depuis que l’Homme s’est sédentarisé, le jardinage n’a pas eu vraiment d’autres fonctions que de nourrir l’Homme. On a longtemps été dans une économie de subsistance et il fallait absolument boucler le cycle annuel de nourriture. Question de survie ! Il fallait tenir jusqu’au printemps suivant et, en cas de disette, aucune possibilité d’aller au supermarché du coin. Ce mode de fonctionnement a duré longtemps et je me souviens qu’étant enfant, tout le monde encore faisait du jardin dans le village, c’était une activité essentielle (le jardinage était une activité obligatoire des classes modestes, c’est devenu aujourd’hui une activité en grande partie réservée aux classes moyennes).

Dans nos campagnes, la société de consommation est arrivée de plein fouet, demeurant encore timide dans les années 60, puis au grand galop dans les années 70 et au-delà. Chacun a pu s’affranchir des contraintes de la terre et du climat. On trouvait de tout sur les étalages, pas besoin de « se casser le cul » à faire du jardin. Emancipation de l’Homme aurait-on pu croire …

Certains, pas plus de quelques personnes par villages, ont continué à cultiver leur petit bout de terre comme si l’époque était restée la même, comme si le modernisme n’avait pas prise sur eux. Ils ont été rejoints à un certain moment par d’autres personnes, souvent plus jeunes, qui avaient soif d’authentique et qui avaient envie de renouer avec la pratique du jardinage.

Mais les préoccupations de ces nouveaux jardiniers sont devenues assez différentes et on peut dire qu’aujourd’hui le jardinage répond à d’autres aspirations.

Car aujourd’hui on ne jardine plus tout à fait pour les mêmes raisons.

Evidemment on jardine toujours pour se nourrir des produits de son jardin. Cette fonction nourricière du jardin existe encore bel et bien (même si très peu de jardiniers arrivent à boucler le cycle annuel de la production de nourriture) et il se pourrait même que cette fonction reprenne du poil de la bête dans les temps qui viennent. Jardiner, c’est donc avant tout produire des légumes !

Mais on jardine aussi de plus en plus dans une démarche qualitative. Car si la plupart d’entre nous a les moyens d’acheter des fruits et des légumes, on sait que la qualité des produits du commerce n’est plus vraiment là. Les pommes sont pesticidées à outrance, les concombres n’ont plus le goût de concombres et les tomates sans goût ont pris une telle apparence de plastique qu’on se demande si ce ne sont pas des produits dérivés du pétrole.

On jardine aussi pour des raisons esthétiques. Car le jardinier est souvent quelqu’un qui aime aménager son espace de vie. Il se crée son petit domaine, façonné suivant son aspiration à vivre dans un espace qui lui convient. Autant de jardiniers différents, autant de jardins différents !

Le jardinage a aussi aujourd’hui, sans doute plus qu’autrefois, une dimension sociale. Le jardin est un lieu de rencontres. Le jardinier aime partager sa passion. Il y a souvent autour de chaque jardinier un micro-réseau de personnes qui parlent de jardinage, se partagent des graines, des conseils, boivent un verre de bière ensemble …  J’aime à dire que le jardinier est un sauvage sociable. « Sauvage » parce qu’il aime se retrouver seul au milieu de ses légumes, de ses fleurs, perdu dans ses pensées…et « sociable » parce qu’il aime partager tout ça. Le jardinier est intarissable quand il parle de ses tomates ou de ses salades, il est même parfois difficile de le faire taire.

On jardine aussi pour « se vider la tête ». Le jardinage peut aider à se déstresser, à prendre de la distance par rapport à sa propre vie, professionnelle ou familiale. Et comme notre société moderne nous inflige une vie hyperactive et trépidante, nul doute que cette fonction de bien-être est une fonction essentielle du jardinage. Quand on est dans son jardin, on ne pense plus vraiment aux tracasseries de la vie quotidienne. Faire du jardin, c’est vivre sans doute dans sa petite bulle mais c’est aussi prendre de la distance, du recul, par rapport aux problèmes. Et combien de problèmes résolus lorsqu’on se met à y réfléchir sereinement, la pioche à la main ?

Il y a aussi parfois, dans les différentes préoccupations des jardiniers d’aujourd’hui, une démarche un peu plus intello, voire même affective. Je m’explique. Cultiver le haricot du père Machin qui nous a été transmis par un voisin, c’est se rattacher à la petite histoire locale. Prendre soin d’une variété d’oignon qu’un Algérien vivant à Besançon m’a donnée, c’est pour moi le fruit d’une rencontre humaine. Prendre soin dans son jardin d’une variété de tomate que cultivaient les Aztèques au Mexique il y a 500 ans, c’est aussi nous relier à quelque chose d’universel, qui vient de loin. Ce ne sont que des exemples. Il y en aurait tellement …

Une autre démarche des jardiniers d’aujourd’hui est une démarche environnementale (dans le sens militant du terme). Jardiner c’est dire NON aux légumes qu’on achète et qui viennent de l’autre bout de la planète, avec un mode de production – en matière énergétique ou en matière d’intrants chimiques – qui produit des ravages au niveau de la planète mais aussi des ravages au niveau économique, en détruisant les économies traditionnelles d’ailleurs et nos emplois de producteurs ici. Il y a donc dans le jardinage ce nouvel aspect, nouvelle fonction, qui est d’ordre politique. Jardiner, c’est un acte citoyen de résistance face au monde que l’industrie agro-alimentaire essaie de nous imposer.

J’ai cité 8 raisons de faire du jardin aujourd’hui. Dans mon quotidien, je me sens riche de toutes ces raisons-là, mais je ne perds jamais de vue la fonction première du jardin qui est la fonction nourricière. Et souvent d’ailleurs, je réagis en fonction de ce critère-là. Car je sais que ce critère peut devenir vital un jour et qu’il est peut-être urgent que chaque jardiner travaille ce point-là.

En conclusion à mon propos, on voit bien, vu la somme des enjeux (production nourricière, souci de qualité, esthétique, vie sociale, équilibre personnel, démarche environnementale …) que le jardinage est quelque chose d’étonnamment moderne et qu’il contribue à répondre aux préoccupations actuelles de notre société.

Meilleurs voeux

A l’heure où je rentre de ma nuit de réveillon (assez arrosée je dois dire), il n’y a pas d’éclairage public dans les rues de Bussières, la municipalité ayant pris – et c’est une très bonne chose – la sage décision d’éteindre les réverbères entre 23H et 5 H. Ce qui me permet de vous adresser une carte de vœux, pas très colorée certes, mais d’une extrême et rare originalité !

Notre monde s’assombrit de toutes parts. Alors je vous souhaite de trouver de la lumière partout où ça sera possible : dans les yeux et les sourires de vos proches, dans les musiques que vous aimez, dans vos poèmes et textes préférés, bref dans tout ce qui nous permet d’avancer sur le chemin chaotique de la vie … mais aussi et surtout à l’intérieur de vous-même !