Sur le site de l’église de Champaubert

30 octobre en fin d’après-midi. Nous voici arrivés à l’église de Champaubert sous une très belle lumière de fin de journée.

 Champaubert est le nom d’un village englouti par les eaux lors de la création du lac du Der en 1974. Seule l’église, plus haut perchée que les autres maisons, a survécu. Deux autres villages ont aussi disparu et une stèle rappelle cet évènement douloureux.

Le lac est très grand (4800 hectares, 77 km de rives) mais à cette époque de l’année, le niveau de l’eau est déjà assez bas.

En effet, il est procédé à la vidange du lac qui va durer tout l’hiver avant une remise en eau au printemps. La création du lac a eu pour but de constituer une réserve d’eau pour réguler le niveau d’eau de la Seine à Paris. Le lac est alimenté par les eaux de la Marne.

Nous sommes arrivés à 17H, la lumière était belle, des cormorans passaient par centaines et les premières grues arrivaient.

L’église de Champaubert n’est pas le meilleur lieu d’observation de l’arrivée des grues (nous sommes en général assez loin des oiseaux) mais c’est sans doute l’endroit le plus approprié pour admirer les oiseaux dans le soleil couchant. Et ce soir là, la lumière fut très belle.

Au loin, des bandes de cormorans, d’oies et de grues passent au-dessus de l’église de Giffaumont.

Des milliers de grues continuent d’arriver dans le soleil couchant.

La lumière baisse très vite. Les silhouettes des oiseaux se détachent à quelques centaines de mètres devant nous.

Il fait froid. Les filles sont gelées et trépignent. Claude et Jérôme qui ont peur de louper l’apéro ont également l’air impatient. Et comme dans ce domaine là je ne me fais pas non plus prier (que ce soit pour l’apéro ou pour aller réchauffer ma belle), on rentre !!!

12 réflexions au sujet de “Sur le site de l’église de Champaubert”

  1. Quelle belle lumière sur les photos 9 et 10 et les suivantes. Les oiseaux en ombre chinoise…Et ce clocher au loin…Dommage que la ligne haute tension se soit glissée dans le paysage.

  2. Il est quasiment impossible dans nos campagnes françaises de faire des photos de paysage sans qu’il y ait ces satanés poteaux ou pylônes électriques ! :angry:

  3. Superbe photo, très bel article. Curieusement pour un site aussi connu, on ne trouve pas sur le net, d’article joliment illustré par des amoureux de l’endroit… La journée commence bien! :smile:

  4. Maïvon, regarde bien sur la photo 9, ce n’est pas des poteaux de lignes à haute tension, ce sont … des calices !!!!!! :devil:

  5. D’après ce qu’on m’a dit, l’église a été reconstruite à cet endroit en souvenir des trois villages engloutis, mais ce n’est pas son site d’origine. Elle n’est ouverte que lors du pèlerinage, pour éviter les déprédations.
    As-tu remarqué que la stèle indiquait que les maires (ou 2 sur 3 je crois) étaient morts; on ne sait pas si, tels les capitaines de navires, ils ont sombré avec leur village … :sad:

  6. Non, non, cette église a simplement été restaurée. Et très bien restaurée même. Je me rappelle qu’au début des années 80 elle était dans un état lamentable et qu’elle a ensuite été entièrement retapée.
    Par contre, et c’est sans doute de là que vient la confusion, l’église de l’un des villages engloutis (Nuisement) a été entièrement démontée puis remontée ailleurs sur un autre site (Sainte-Marie-du-Lac-Nuisement).
    Les trois maires sont décédés. J’imagine que leur fin de vie a été triste.

  7. je vois que le Grand cormoran est toujours présent sur le Der !! Un chasseur/pêcheur du département 51 est venu sur mon site me quereller il y a quelques temps , car j’avais fait un article où l’on voyait ce bel oiseau ( oui je le répète  » bel oiseau « ) chasser dans un estuaire de ma région . Il m’a parlé des ravages des cormorans sur la population piscicole et patati et patata … Qu’il fallait éliminer cet oiseau tout comme , le Héron cendré , l’Aigrette garzette , Les faucons , l’Épervier d’Europe ( dégâts autour des mangeoires ! ) , la Buse … et j’en oublie !! Et lui aussi , il avait oublié le Martin pêcheur , grand prédateur de petits poissons blancs !!! Celui-là aussi , il mérite un bon coup de fusil … Non !
    Lorsque je lui ai demandé : Pourquoi la buse ? Réponse : Parce que c’est un « vrai rapace  » pour les autres oiseaux !! Ah ça c’est bien vrai ça … La Buse est un vrai rapace !
    :biggrin:

  8. Bravo, Yves, tu gardes le sens de l’humour!
    Et il en faut, dans certains cas …
    Tu aurais pu aussi lui demander pourquoi, en tant que chasseur, il te querelle sur les dégâts piscicoles du cormoran et consorts? Cherchez l’erreur … :wink:

  9. Ces engloutissements de villages ont été des déchirements profonds pour les habitants.
    On peut en avoir un aperçu par la lecture de cette relation poignante des derniers jours du village de Tignes en Savoie (extrait du livre « Tignes autrefois » de Brigitte Alzieu et Eveline Alzieu-Martin) :
    « Nous voici arrivés à l’année fatidique : 1952.
    La mort du village est programmée pour le printemps. Malgré le mur du barrage qui monte inexorablement, tout semble être calme. Tignes continue à vivre comme s’il avait des siècles devant lui mais la mise en eau est imminente.
    Samedi 1er mars
    Le sous-préfet d’Albertville déclare que Tignes a cessé d’exister en tant que chef-lieu. Tout doit être transféré : archives, école, poste, église et cimetière … Voici la sentence de mort que le village appréhendait.
    Lundi 3 mars
    Les ouvriers des télécommunications ont enlevé tous les fils des poteaux. Désormais, Tignes n’est plus relié au reste du monde. Le standard téléphonique est emporté. La poste est transférée aux Brévières.
    Jeudi 6 mars
    En fin de matinée, le tocsin sonne. L’archiviste départemental est à Tignes pour déménager les archives aux Brévières. La population alertée lui interdit l’accès de la mairie. Dans l’après-midi, une délégation d’une quinzaine de Tignards se rend au tribunal de Moûtiers pour assister au dernier acte du conflit juridique à propos des indemnisations.
    Samedi 8 mars
    Très tôt, en cette froide matinée, le tocsin a retenti. Toute la population s’est regroupée devant la mairie. Un gros contingent d’émigrés est aussi présent, prêt à participer à la défense du pays natal. Cette fois-ci, pour s’emparer des archives communales, le préfet est venu en personne, accompagné du sous-préfet et d’une bonne escorte de gendarmes et de C.R.S. Peine perdue, les Tignards ne veulent pas qu’on leur vole leur « mémoire ». Ce samedi, on célèbre aussi à Tignes le dernier mariage, celui d’une fille du pays avec un ouvrier du barrage. Les nouveaux mariés sont photographiés par les journalistes comme des stars internationales !
    Dimanche 9 mars
    Dimanche presque ordinaire… on vote ! Les Tignards sont appelés aux urnes pour élire un nouveau conseil municipal.
    Lundi 10 mars
    Il neige ce matin sur toute la vallée de l’Isère. Mlle Boch, l’institutrice, et son adjointe, réunissent les enfants à l’école pour la dernière classe.
    Quelqu’un a écrit au tableau noir : « Nous ne laisserons pas mourir Tignes ». Mlle Boch, très émue, a du mal à expliquer la situation aux enfants. Devant l’école, les petits font un feu. Ils brûlent leurs cahiers en chantant : « Vivent les vacances, à bas les pénitences, les cahiers au feu, l’E.D.F. au milieu ! »
    Ce même jour, leurs parents reçoivent une lettre terrible annonçant le début de l’exhumation des morts au cimetière.
    Mardi 11 mars
    En désespoir de cause, les Tignards lancent un appel au Président de la République. Vincent Auriol répond : « Les pouvoirs publics et le pays n’oublieront pas les sacrifices faits par le village. » A quelques jours de la « grande noyade », beaucoup d’habitants ne savent pas encore où ils iront. Le journal Le Dauphiné Libéré décide d’ouvrir dans sa page de petites annonces une rubrique intitulée « Les Tignards cherchent » afin que ceux-ci puissent demander des emplois ou des logements.
    Mercredi 12 mars
    Le cimetière Saint-Claude est recouvert d’un mètre de neige, le terrain est gelé. Mais il faut procéder aux exhumations. En fin d’après-midi, un bulldozer tente de dégager la route du cimetière. Un groupe de Tignards, immobile, se poste devant lui, l’engin doit rebrousser chemin.
    Jeudi 13 mars
    On commence à démolir trois maisons à la Chaudanne, hameau le plus proche du barrage.
    Samedi 15 mars
    Ce matin, à six heures, on devait fermer les vannes du barrage. Mais E.D.F. temporise et n’a rabattu que les vannes de dérivation de l’Isère. L’eau s’accumule au pied du barrage, l’agonie de Tignes commence.
    Dimanche 16 mars
    La messe est retransmise à la radio. L’abbé Pellicier exhorte ses paroissiens : « Des événements graves vont se produire les jours prochains. Je vous recommande de rester calmes et forts. Nous ne pouvons plus que nous résigner. » C’est le deuxième tour des élections.
    Lundi 17 mars
    A quatre heures du matin, trois cents C.R.S. envahissent Tignes. Ils occupent les points stratégiques, dont le clocher pour empêcher qu’on sonne le tocsin. A cinq heures, le préfet est là. Le porte-parole des Tignards, Justin Reymond, est tiré du lit. On le somme de remettre les clés de la mairie, ce qu’il fera contraint et forcé ! Les archives sont déménagées, sans trop de précautions, par les forces armées, et la mairie est vidée de ses meubles. Radio-Luxembourg fait entendre sur ses ondes les cloches de l’église bientôt condamnées au silence.
    Mardi 18 mars
    Le préfet déclare que la mise en eau définitive aura lieu à midi et annonce que ceux qui ne voudront pas partir immédiatement perdront le bénéfice de leurs indemnités.
    Mercredi 19 mars
    A l’église, on commence à démonter les retables des chapelles latérales. Les cloches sonnent le dernier angélus puis elles sont descendues du clocher. A vingt-deux heures, les deux vannes latérales du barrage s’abaissent… Tignes est définitivement condamné.
    Jeudi 20 mars
    Le ciel est couleur de plomb sous les nuages bas. Tignards et C.R.S. se côtoient à tous les coins de rue. Le village est maintenant étrangement calme. A Saint-Claude, les exhumations commencent, mais le cimetière des Boisses n’est pas encore terminé. Alors, les trop nombreux cercueils sont empilés dans la minuscule chapelle de Reculaz !
    Vendredi 21 mars
    L’eau monte de un mètre par jour. A la Chaudanne, treize maisons sont démolies.
    Samedi 22 mars
    Au chef-lieu, seule une famille habitant à côté de l’église s’apprête à déménager.
    Dimanche 23 mars
    Dans une église étrangement dénudée où il ne reste plus que le Maître Autel, neuf enfants font leur communion solennelle.
    Lundi 24 mars
    L’eau monte inexorablement. Certains Tignards, qui ont cru jusqu’au bout que la commune ne serait pas noyée, sont affolés. Ils ne savent pas où aller… et pourtant il faut partir.
    Mardi 25 mars
    Suite à la maladresse d’un plombier démontant des installations de chauffage, l’hôtel de la Grande Sassière s’embrase. Les flammes atteignent l’hôtel mitoyen de l’Aiguille Percée. Ironie du sort, les pompiers manquent d’eau ! Il ne reste que des ruines calcinées des deux bâtiments.
    Du mercredi 26 mars au 30 mars
    L’eau ne monte plus que de 50 centimètres par jour. Le remplissage du barrage a été ralenti pour permettre de finir les exhumations au cimetière. Les déménagements se poursuivent. Au fil des jours, bon gré, mal gré, le village se vide de ses habitants.
    Lundi 31 mars
    Mlle Boch commence l’école à Reculaz. La fromagerie ferme définitivement ses portes avec la dernière traite du soir. Toutes les vannes sont désormais fermées et la mise en eau s’accélère.
    Mardi 1er avril
    L’ordre est donné de démolir l’église immédiatement. Or, tout le mobilier n’est pas encore enlevé.
    Mercredi 2 avril
    L’abbé Pellicier s’oppose à la destruction de l’église. Il veut garder l’utilisation de son lieu de culte jusqu’à Pâques.
    Jeudi 3 avril
    Les meubles de la sacristie et les stalles du chœur sont emportés.
    Dimanche 6 avril
    Dimanche des Rameaux. A quinze heures, l’évêque vient présider les vêpres et soutenir le moral de la population.
    Jeudi 10 avril
    C’est Jeudi saint. Un reposoir, confectionné avec des fleurs envoyées par les premiers « exilés », est mis en place sur l’unique autel qui reste dans l’église. Les coupures de courant se multiplient.
    Dimanche 13 avril
    Le village semble abandonné. Pourtant, près de 200 personnes assistent à l’office de Pâques dans l’église définitivement mutilée de ses retables.
    Lundi 14 avril
    Le toit de l’église est démonté, puis on s’attaque au plancher. Au fur et à mesure du départ des familles, les maisons sont dynamitées.
    Dimanche 20 avril
    Dans une église quasiment en ruine, sans toit ni plancher, l’abbé Pélicier célèbre la dernière messe sur un autel de fortune. Le dernier Tignard est sorti de sa maison, manu militari, par les C.R.S., avant qu’elle ne soit détruite par les explosifs.
    Mercredi 23 avril
    L’eau envahit l’église, les ouvriers y mettent en place les explosifs … Il en faudra une tonne.
    Jeudi 24 avril
    19h15, l’église de Tignes a été dynamitée… Le clocher s’est abîmé comme un grand arbre qui tombe sous la hache des bucherons. Il devait tomber vers le barrage, mais il s’est incliné à l’opposé, vers la montagne, et s’est couché de tout son long sur la nef… L’abbé Pellicier assiste impuissant, depuis Reculaz, au dernier acte de mort de son église.
    Deux mois plus tard
    Le village a complètement disparu sous les eaux du barrage. A sa place, un lac s’étend peu à peu. »
    On peut aussi en avoir un aperçu par l’image de ce déchirement en regardant l’excellent film « La Folie des Hommes » (http://fr.wikipedia.org/wiki/La_Folie_des_hommes) qui retrace la mise en eau du barrage de Vajont dans les Dolomites mais aussi la suite catastrophique qu’on connait.
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Barrage_de_Vajont

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