Bye bye bird

Mon idée première, pour ce premier dimanche musical de l’année, était de faire un « best of » des meilleures vidéos que j’avais publiées l’an passé. Et puis, en classant mes anciens articles dans de nouvelles rubriques (vous avez-vu que maintenant tous les « petits dimanches musicaux » sont rangés dans une seule et unique rubrique ?), je suis tombé sur un ancien article que j’avais écrit il y a plus de trois ans et qui concernait un morceau que j’adore : « bye bye bird » de Sonny Boy Williamson. A l’époque, j’avais écrit l’article sans mettre de vidéo, uniquement en essayant de décrire au mieux la prestation de ce bluesman, car  je ne connaissais pas encore Youtube. Plus tard, au cours d’un autre article, je crois avoir mis un lien sur cette vidéo et certains d’entre vous s’en souviennent peut-être.

Finalement, je crois que ce morceau de Sonny Boy Williamson correspond bien à ce que j’ai envie de dire pour un premier dimanche musical de l’année. D’où mon choix de ce jour avec cette vidéo unique.

Et qu’ai-je envie de dire avec cette vidéo ? Que quelque soient les artistes que nous lisons, écoutons ou regardons les oeuvres, il ne faut attacher de l’importance qu’à ceux qui vivent leur art sans artifice, loin du monde du show-bizz, et qui ne trichent pas avec leur public. Sachons reconnaître ceux qui se donnent avec simplicité, même dans la complexité de leur art. Sonny Boy Williamson, inconnu de la plupart de ses contemporains (il est mort il y a 45 ans) était de ces artistes-là, d’une grande sincérité et d’une sacrée trempe.

Ce n’est pas dans mon habitude de recycler un ancien article. Promis, je ne le referai plus. Mais place d’abord à la vidéo.

Image en noir et blanc. Pièce austère au décor très sobre. Au milieu, un grand bonhomme à l’allure déguingandée. Et qui semble un peu étranger à notre monde.

Le son de l’harmonica retentit. Première notes longues et plaintives. Puis un rythme lancinant qui s’installe. Caméra hésitante qui zoome lentement pour s’arrêter sur un visage étonnant. La voix retentit. Un peu lasse mais si émouvante. Les trois mots répétés ressemblent à un hymne incantatoire Bye bye Bird, Bye bye Bird, … Devant le visage, les mains évoluent de manière incroyable. A-t-on déjà vu des mains pareilles ? Les doigts se lient, se délient et jouent une danse reptilienne autour de l’harmonica. Ils semblent presque faire l’amour à l’instrument. Le corps est animé de mouvements chaloupés. L’homme fait corps avec sa musique. Le deuxième couplet est aussi dénudé. Pendant que résonnent les trois mots Bird I’m gone, la caméra refait le chemin inverse. Zoom arrière donc. L’harmonica est alors planté dans le bouche et les mains continuent ailleurs leur travail : les doigt claquent puis les mains se frappent.

La danse hypnotique se termine en douceur. Dos voûté, saluant timidement le public, Sonny Boy Williamson quitte le champ de la caméra sur la pointe des pieds. Le coeur du spectacteur bat alors très fort.

Scène filmée en 1963, avec une seule caméra. Sobriété de moyens typique de l’époque. Et qui sied à merveille à cette musique dépouillée. Toute la magie du blues condensée dans trois minutes d’émotion.

46 réflexions au sujet de “Bye bye bird”

  1. Cette artiste que tu nous présentes ( et que j’adore , j’en ai déjà parlé sur ce blog ) Est Rice MILLER dit Sonny Boy Williamson 2 (né Aleck FORD MILLER à Glendora, Mississippi, le 05 Décembre 1899. Décédé le 25 Mai 1965 à Helena, Arkansas) . Bon dieu fallait s’y retrouver avec tout ces noms et prénoms pour un seul et même bonhomme !!!
    http://abcbluesandsoul.com/sonyboywilliamson2.aspx

    Alors qu’il a eu un autre Sonny Boy Williamson !!

    Sonny Boy Williamson 1 qui avait pour vrai nom John Lee Williamson (né le 30 mars 1914 près de Jackson dans le Tennessee et mort le 1er juin 1948)
    http://abcbluesandsoul.com/sonnyboywilliamson.aspx

  2. A propos de ce William Boy Williamson I, voici ce qu’avait écrit Anne il y a trois ans lorsque j’avais écrit mon premier article :

    Curieux bonhomme que ce Sonny Boy Williamson, qui prétendait être né en 1899, alors qu’un chercheur a prouvé qu’il était né en 1912. Sans doute pour défendre sa thèse qu’il fut le premier Sonny Boy Williamson, alors qu’il a usurpé le nom du « vrai » Sonny Boy Williamson (John Lee Williamson), premier harmoniciste de blues à avoir imposé cet instrument des rues.
    « Lorsqu’il arrive en Europe en 1963, encore inconnu, Sonny Boy Williamson déclenche une hystérie en partie attribuable à son extraordinaire présentation scénique. Ce sexagénaire on ne peut plus vert se produit vêtu d’un costume de bouffon, coiffé d’un chapeau melon, un parapluie au bras. Si l’on ajoute à cela des yeux de magot chinois et une barbichette de mousquetaire, on comprendra peut-être pourquoi le public européen – anglais en particulier- lui fait un triomphe. Sonny Boy Williamson n’est plus seulement un bluesman ; pour toute une génération de musiciens britanniques, il EST le blues ».

  3. J’ai un DVD de l’American Blues Folk Festival sur lequel on voit Sonny Boy arriver sur scène avec son parapluie et son chapeau melon mais la vidéo en question n’est pas sur Youtube. Par contre, il existe plusieurs morceaux de Youtube sur lesquels, si le parapluie est absent, le chapeau melon est bel et bien là. Par exemple celui-ci :

  4. Une autre version de Rock me baby, par quatre bluesmen qui ont sont déjà à l’âge où il leur faut une chaise pour jouer le blues :

  5. Dans ta vidéo, Yves, j’aime beaucoup l’interprétation de « Little red rooster » de Arno. Sur scène, Arno n’a toujours pas, malheureusement, cette veine blues.

    J’ai souvent eu l’idée de faire un dimanche musical « variations autour de little red rooster ».

  6. Si durant toute l’année 2010, les articles du blogadupdup sont de cette qualité, on va se régaler encore plus de d’habitude ! :wub:
    Mais comment fait il (pas dupdup mais le musicien, quoique Dupdup est aussi un musicien) ?
    Je veux dire pour jouer de l’harmonica sans le tenir avec les mains (qui sont fort dimensionnées (et le reste ? :shocked: ).
    Est-ce qu’il utilise la même technique respiratoire que les joueurs de Didjeridoo ?

  7. Si durant toute l’année 2010, les articles du blogadupdup sont de cette qualité, on va se régaler encore plus de d’habitude ! :wub:
    Mais comment fait il (pas dupdup mais le musicien, quoique Dupdup est aussi un musicien) ?
    Je veux dire pour jouer de l’harmonica sans le tenir avec les mains (qui sont fort dimensionnées (et le reste ? :shocked: ).
    Est-ce qu’il utilise la même technique respiratoire que les joueurs de Didjeridoo ?

  8. Il fait comme Moi , l’harmonica je le tiens avec mon …… Noooonn , je déconne !!!
    :lol:
    Bon je vous laisse j’ai un apéro qui m’attend …

  9. Ca me rappelle une histoire :
    A la période de la récolte des cerises, on embauche les étudiants, et aussi d’autres, tous ceux qui ont envie de gagner quelques sous.
    Bref, la patronne regarde ce que celui-là a ramassé et lui dit :
    « Oh, mais ça ne va pas du tout, les cerises, ils faut les ramasser avec la queue ».
    Et celui-là répond :
    « Oh, mais j’ai déjà beaucoup de mal avec les mains ! ». :lol:

  10. J’ai écouté du reggae une bonne partie de la journée et lorsque la chanson « redemption song » de Marley est passée sur la platine, j’ai eu envie d’écouter la version qu’en ont faites Johnny Cash et Joe Strumer (leader des Clash) juste avant leur mort. Version extraordinaire.

    Et qu’est-ce que je m’aperçois ce soir ? Que l’on peut insérer une vidéo dans un commentaire (ce qui n’était pas possible avec l’administrateur de mon site il y a quelques semaines encore) ! Miracle !

  11. Yeah, je viens de modifier plusieurs de vos commentaires ci-dessus en y insérant les vidéos dont vous aviez mis le lien. Sur mon ordi, ça marche. Et sur le vôtre ?

  12. Petit mode d’emploi avec Youtube :
    allez à droite de la vidéo que vous voulez insérer et cliquer sur « intégrer une vidéo sur un site ». Apparaissent en dessous des icones couleur la dimension des vidéos. Cliquer sur la largeur 425 (si possible, c’est celle qui va le mieux car elle fait juste la largeur des commentaires, sinon ça dépasse du cadre). Cliquer ensuite sur le code « et faites un copié-collé dans le commentaire …
    Génial ! :smile:

  13. Ça vient, ça vient… Stakhanovistes du blog !
    Je vais d’abord lire vos contributions (quelques regards en pointillés ces derniers jours) et tenter de vous dégotter le lien que je voudrais.
    2011 ça irait ?

  14. Ma maman, née en 1913, a eu plusieurs chiens dans sa vie.
    Mais celui dont elle me parlait sans cesse avait nom « Sonny ». C’était un peu le grand-frère qu’elle n’a jamais eu.
    Il avait été ainsi nommé par mes grands-parents en référence à ce Monsieur Sonny boy Williamson.
    Ca me fait tout drôle—-
    Chiche que je vous retrouve une photo de ce chien aimé?

  15. Et aussi ce travail extraordinaire dans lequel on retrouve quelques images du feu Williamsson.

    L’ensemble du travail de giovanni sample est visible sur son site.

  16. Je pense que c’est là l’une des meilleures vidéos que l’on puisse trouver sur le blues de cette époque-là.
    Quand je relis mes propos, il m’arrive rarement d’aimer quelque chose que j’ai écrit sur ce blog. Mais, une fois n’est pas coutume, je ne renie rien de ce que j’ai écrit à propos de cette vidéo :

    « Image en noir et blanc. Pièce austère au décor très sobre. Au milieu, un grand bonhomme à l’allure déguingandée. Et qui semble un peu étranger à notre monde.

    Le son de l’harmonica retentit. Première notes longues et plaintives. Puis un rythme lancinant qui s’installe. Caméra hésitante qui zoome lentement pour s’arrêter sur un visage étonnant. La voix retentit. Un peu lasse mais si émouvante. Les trois mots répétés ressemblent à un hymne incantatoire Bye bye Bird, Bye bye Bird, … Devant le visage, les mains évoluent de manière incroyable. A-t-on déjà vu des mains pareilles ? Les doigts se lient, se délient et jouent une danse reptilienne autour de l’harmonica. Ils semblent presque faire l’amour à l’instrument. Le corps est animé de mouvements chaloupés. L’homme fait corps avec sa musique. Le deuxième couplet est aussi dénudé. Pendant que résonnent les trois mots Bird I’m gone, la caméra refait le chemin inverse. Zoom arrière donc. L’harmonica est alors planté dans le bouche et les mains continuent ailleurs leur travail : les doigt claquent puis les mains se frappent.

    La danse hypnotique se termine en douceur. Dos voûté, saluant timidement le public, Sonny Boy Williamson quitte le champ de la caméra sur la pointe des pieds. Le coeur du spectacteur bat alors très fort.

    Scène filmée en 1963, avec une seule caméra. Sobriété de moyens typique de l’époque. Et qui sied à merveille à cette musique dépouillée. Toute la magie du blues condensée dans trois minutes d’émotion. »

  17. On connaît les Moody Blues essentiellement à cause de leur tube « Nights in white satin ».
    Mais on sait peu qu’ils manient le blues à la perfection. Pour preuve cette version enjouée (pour ne pas dire endiablée) de Bye Bye Bird qui diffère complètement de celle de Sonny Boy Williamson (je viens de tomber sur cette version à l’instant) :

  18. un des 2 disques anglo-saxons disponibles au juke box du café provincial, que je fréquentais avec un copain, lors de la sortie du jeudi après midi de notre internat de lycée…L’autre était « Hey Gip » de Donovan, un peu dans la même veine…
    Une très bonne initiation, effectivement, que ces morceaux là, dégustés avec la grenadine…

  19. Pour Yves : oh oui, je suis bien d’accord avec toi, il y a quelque chose d’assez magnétique dans la version de Sonny Boy Williamson.
    La version des Moody Blues a quand même le mérite de faire de ce morceau quelque chose de complètement différent par rapport à l’original. Et puis c’est un très bon document visuel qui témoigne de la manière dont les musiciens anglais se sont appropriés le blues (pas seulement les Moody Blues mais aussi les Stones, les Animals, John Mayall) à une époque où le blues avait disparu de la scène (y compris aux Etats-Unis).

  20. Je ne connais pas la version de Sonny Boy Williamson (que je n’entends chanter que sur mon « American Folk Blues Festival 1964 »).Peut être à découvrir sur Youtube.

    Par contre, à l’époque j’essayais bien,moi, à la maison, de plagier les Moody Blues et Donovan sur mon harmonica musette Horner chromatique, mais ça ne donnait rien;
    « je n’ai pas leur talent » me disais je…Pour sûr! c’était vrai, mais je n’avais surtout pas la gamme des petits marine-bands à un ton….
    Pour Donovan j’adore son » season of the witch ». Interprété aussi par Bloomfield, Kooper, Stills dans leur « Super Session » (Tiens, des noms familiers…).

  21. Hou la la, pas la peine d’aller faire une recherche pour trouver la version de Sonny Boy Williamson, elle est sur cet article que j’ai d’ailleurs appelé tout simplement Bye Bye Bird
    :wink:

  22. Superbe!
    Il suffisait de se donner la peine de bouger légèrement le curseur !
    Et ta chronique de présentation !Il y a des talents qui dorment, réservés à une élite (nous bien sûr). A tu déjà proposé tes écrits à des revues musicales ? Ça leur amènerait un peu de passion et de lyrisme, et de la finesse d’écriture. Ça changerait des diverses moues perplexes et distantes…

  23. Une reflexion, au fait,
    Bye bye bird….
    Qui est cet oiseau qui se pose souvent dans la chanson anglo-saxonne ?
    A l’aile cassée dans « love minus zero » de Dylan et « Blackbird » des Beatles, qu’avait évoqué Christophe un jour?Dans le traditionnel « Corrina Corrina » ,chanté par Dylan aussi.
    Like a bird on the Wire….
    Peut être celui qu’on entend dans « cirrus minor », à l’ouverture de More des Pink Floyd? (d’ailleurs de compétents ornithologues çi présents pourront peut être l’identifier) ?

  24. Oui, grive musicienne à l’ouverture de More.
    C’est une période de Pink Floyd que j’ai beaucoup aimée et j’ai énormément écouté leurs premiers disques de cette période-là. J’aime beaucoup les deux premiers (the piper at the gates of dawn, très peu connu, et A saucerful of secrets). Bien sûr More et Ummagumma. Le disque Atom Heart Mother (« la vache ») est sans doute celui que j’ai le plus écouté mais c’était déjà trop bien produit pour moi. Puis vinrent les disques Meddle, The dark side of the moon et je dois avouer que je n’ai pas été très sensible à cette recherche du beau son à tout prix (mais évidemment ce sont de très bons disques). Puis j’ai décroché avec Pink Floyd et le rock en général pendant quelques années (dans la deuxième moitié des années 70 je n’ai plus écouté que de la musique classique pour ne renouer avec le rock que quelques années plus tard avec l’arrivée de Clash, Cure, Joe Jackson et des Stranglers qui redonnaient un nouvel élan à la musique).

  25. Je me demande si le « blackbird » des Beatles et de Dylan est le même…
    Sans doute le merle noir en Angleterre et le carouge à épaulettes aux USA.

  26. Dylan n’appréciant pas les honneurs, je me demande si un oiseau à épaulettes lui correspond … :wink:

    A noter cette version récente (live 2016) du Blackbird des Beatles par David Crosby et Joan Baez.

  27. Frusquin parle juste d’un oiseau à l’aile cassée dans la chanson Love Minus Zero / No limit de Dylan mais pas d’un « blackbird ». Il s’agit d’un corbeau car le texte de Dylan fait allusion à Raven dans les deux derniers vers de la chanson.

    My love she’s like some raven
    At my window with a broken wing.

    Le seul document vidéo que j’aie trouvé sur cette chanson à l’époque de sa création, ça se passe en 66 dans la chambre d’hôtel de Dylan :

    C’est une chanson que je connais bien, la seule de Dylan que j’aie essayé de jouer à la guitare (il y a plus de 40 ans de cela).

  28. Bonjour amis des zozieaux ! En parlant de Blackbird, mes enfants m’ont fait découvrir celle-ci :

    Frissons pour moi ! et vous ?
    Bon dimanche.

  29. Espérons que ces sympathiques morts qui marchent soient reconnaissants qu’on les accompagne d’une aussi jolie musique et deviennent des gratefull dead .
    Après tout, sur tous les monuments aux morts c’est la patrie qui leur est reconnaissante ,il fallait bien qu’ils renvoient un peu l’ascenseur…A moins que ce soit pour se moquer?
    Mais les quelques walking dead que j’ai pu voir n’avaient pas l’air d’avoir le sens de l’humour! Ils avaient l’air trop affamés, les pauvres !
    Ah, décidément la faim dans le monde est un fléau, tant de gens sont morts de faim!

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