Il a beaucoup plu ces jours-ci : 80 mm (80 litres/m2), ce qui est énorme. Il est tombé en deux jours ce qu’il tombe habituellement en cinq semaines. En 24 heures, il est même tombé 50 mm (du mercredi 16H au jeudi 16H).
C’est Dan, familier du pluviomètre, qui vient de me communiquer ces chiffres. Et dans son mail, il m’écrit : Et comme un « bonheur » ne vient jamais seul, arrivée de deux pinsons du nord à la mangeoire pour la première fois depuis deux ans.
J’aime bien cette idée de bonheur associée à celle de la pluie. Je me suis d’ailleurs déjà exprimé plusieurs fois en ce sens sur ce blog. J’ai été très heureux de voir tomber ces gouttes d’eau, j’ai toujours dans ces moments-là ce sentiment très fort que la nature avait besoin de cette eau pour revivre. Mais aussi la sensation puissante que, d’un point de vue physiologique, mon propre organisme avait besoin – aussi bien dans la tête que dans le corps – de cette arrivée de pluie.
Et vous, vous avez apprécié cet épisode pluvieux ?
Te dirai demain matin… après le bain de boue nocturne….
Pas plus apprécié que ça, non :
– parce que je vais au boulot à vélo (c’est plus dangereux dans les descentes et désagréable de bosser avec le pantalon et les chaussures mouillés)
– parce que je suis instit (et les surveillances de récréation sous le préau sont souvent pénibles)
A part ça… J’entends bien que la Terre en a bien besoin.
(Quant à mon propre organisme, 5 min de douche – chaude – quotidienne lui suffisent)
Les filles et les mecs de la météo, quand il va pleuvoir, annoncent, navrés, l’arrivée du « mauvais temps ». Pourquoi calomnier, les gouttes, leur chant, leur souplesse de chats, leurs bonds élastiques ? La pluie est belle, et les femmes qui, vêtues d’un imperméable dont le vent soulève le col, courent pour l’éviter, le sont aussi. J’aime la pluie autant que le soleil, et, avec Soror, roman que seuls mes lecteurs les plus fidèles ouvrirent, j’ai fait d’elle une héroïne. À la question : qu’avez-vous fait de votre vie ? je répondrai : j’ai écrit quelques pages sur la pluie. La pluie est miraculeuse. Dans nos cours, grâce à elle, le gravier retrouve la couleur qui était la sienne au fond des rivières, semblable à celle dont sont parées ces électriques et fines surfeuses communément appelées truites. La pluie, usant avec fantaisie de ses mailloches, transforme nos toits de tuiles ou d’ardoises en xylophone. Le xylophone s’appelait jadis harmonica de bois, et c’est ce vieux nom tombé en désuétude, aussi beau que le crayon rouge et bleu que le charpentier glisse entre son oreille et son béret, que la pluie ressuscite chaque fois qu’elle choit.
(Percolateur n°53, chronique du 06/11/07, Nouvelle République des Pyrénées)
Je serais curieux de savoir ce qu’en pensent les gouttes d’eau : sont-elles ravies de revenir sur terre (parce qu’elles s’ennuient et se les gèlent grave, là-haut dans les nuages) ou au contraire vivent-elles cela comme un travail, une punition, une « chute » ?
Moi ce qui m’a énervé dans cet épisode pluvieux, c’est que c’est tombé pile les jours où je suis sorti avec mon parapluie : du coup, il était chaque fois trempé !!!
Moi j’aime le soleil. Mais ce qui m’énerve avec les jours de soleil, c’est que ça tombe pile les jours où je sors avec mon chapeau de soleil : du coût, mon visage est à l’ombre et il ne voit pas soleil …
« Les gouttes de pluie sont des grains de raisin sans peau ni pépins. »
(Soror, Fayard, 2003)
Oui bien au chaud sous les 3 épaisseurs d’habits ça va. Ici à 600m l’humidité à vite tendance à nous glacer les os….
et pour le chien c’est extra de lui essuyer les pattes (4!!!!!) à chaque fois!!
Le principal est que la Terre en avait besoin, pour le reste eh bien on s’adapte….
Finalement, la pluie, ce que ça a de bien, c’est quand on revient au chaud et au sec… et sinon, c’est un peu mouillé, un peu froid, mais pas plus gênant que ça !
Bas dellebent !
On apprécie effectivement beaucoup le chaud et le sec lorsqu’on revient frigorifié et humide. En temps normal, dans notre mode de vie moderne, on apprécie nos intérieurs de maison douillet, mais peut-être pas à leur juste valeur. Le fait de rentrer transi nous les fait apprécier d’autant plus.
C’est un peu comme lorsqu’on fait de la marche en montagne. Lorsqu’on s’arrête de marcher, on apprécie énormément le fait de s’asseoir, de s’allonger, de manger un fruit sec, … et même de soulager sa vessie. Autant de choses très banales qu’on apprécie pas forcément habituellement.
Autre remarque : on aime parfois les choses à cause de leur contraire. J’apprécie particulièrement le soleil … parce qu’il génère de l’ombre. J’aime aussi le temps froid à cause de la chaleur de l’intérieur des maisons …
Et peut-être même qu’on peut aimer « les choses à cause de leur contraire »… parce qu’elles nous font aimer, par contrecoup, « les choses qui ne te font pas aimer leur contraire » !
Ca fait maintenant 4 ans que j’habite Carpentras (Vaucluse). Très beau département ou il y pleut plutôt rarement mais quand ca tombe c’est du délire.
Samedi j’ai vu le père d’un collègue de boulot qui m’a dit qu’il était tombé 165 mm dans la nuit de jeudi à vendredi.
C’est carement un mur de flotte qui nous tombe dessus.
Alors dans ces circonstances même pas on pense à faire du vélo ou sortir le chien.
Mais depuis dimanche le Mistral soufle à 90/100 km/h et il a déjà tout séché.
Le Mistral: Sympathique vent venu de l’est qui est fort agréable l’été mais franchement HORRIBLE en hiver.
En méditant la question posée plus haut, j’en suis arrivé à cette conclusion :
Les nuages correspondent au sommeil des gouttes d’eau.
La pluie au réveil puis le ruissellement, l’arrosage, l’infiltration, etc. aux heures de boulot.
L’arrivée dans l’océan à la fusion dans le Grand Tout qu’est la mort (qui est en même temps une gestation dans la mère/mer)
Les humains, on ne sait pas, mais l’eau, elle, se « réincarne » d’une certaine façon.
Aaaaaaah, d’accord !
La pluie, le réveil, le boulot, etc…
Je me demandais aussi pourquoi tant de gens avaient plus ou moins envie de pleurer le matin, au moment d’aller au boulot.
Ce serait donc une simple histoire d’eau qui pleut dans les yeux ?
à Fred D : 165 mm, c’est effectivement du délire ! Pour ceux qui ont du mal avec le chiffres, vous prenez 16,5 gros arrosoirs de 10 l que vous versez sur un carré d’un mètre sur un mètre. Impressionnant ! On est bien finalement en Franche-Comté.
Et voilà, il suffit d’une Histoire d’ô pour que Vincent se mette au spiritualisme …!!
Ah Assourdi ! toi aussi tu es fan de Combet ?
Du « spiritualisme », Assourdi ? Parce que je parle de réincarnation ? Que j’imagine ce que peuvent « penser » des gouttes d’eau ?
Peut-être… Après tout pourquoi pas (je n’ai jamais caché, je crois, être dénué de toute tentation « idéaliste/spiritualite » et savoir comment à tous les coups m’en prémunir).
Mais là, en l’occurence, et de mon point de vue, il s’agirait plutôt d’anthropomorphisme : une simple figure de style « poético-symbolique » qui n’a aucune prétention à décrire une réalité objective.
Ce qui est compliqué, en même temps, avec ces « grands mots », c’est qu’on ne les entend pas tous pareil (Les définitions, par exemple, données par Isidore en commentaire de l’article Bas les PAT, ne correspondent pas aux miennes). D’où, parfois, des malentendus amenant des oppositions et des débats un peu artificiels tant qu’on ne s’est pas « éclairci le vocabulaire ».
Tu entends quoi, plus précisément, Assourdi, par « spiritualisme », stp ?
Pour Vincent :
Eh! C’était une blague … Ouh la la, ce que ça devient sérieux, des fois … Du coup, je trouve que tu as raison : restons simple
Pour Oups :
si c’est Paul-Louis, j’ai lu quelques trucs, ça ne m’emballe pas… Si c’est Claude-Louis, je ne connais pas.
Claude Louis. ¨Pour autant que je me souvienne, il a écrit une « histoire d’ô »…
L’eau a faim
De la terre
Et la terre
A soif de l’eau.
Quand tombe
La pluie
On entend quelqu’un
Qui avale
Et quelqu’un qui mastique.
*
La pluie
Perdait
Tous ses cils
A force
D’avoir pleuré.
*
La pluie
Mouillée
S’égoutta
Dans le bassin.
*
La pluie
Vint
Quand
Les grosses pierres
Ne purent
Plus
Suer.
*
La pluie
Se moucha
Dans
Ses dernières larmes.
*
La pluie
Barbouillée
De vent
Alla
Se laver
Les yeux
Dans l’étang.
(Sens magique, 1957)
Il pleut. L’eau joue au clavecin sur l’étang, pendant que les mille doigts du vent passent et repassent sur les cordes élastiques de l’eau qui tombe, comme des mains éoliennes sur les cordes sonores d’une harpe.
*
La goutte d’eau qui tombe s’étale en parachute avant de choir. Sans cet effet d’auto-ralentissement de l’eau dans sa chute par ovalisation, point de végétation qui résistât dans ses jeunes pousses et ses cœurs tendrelets à l’effet coupant de l’eau. Outre l’effet dévastateur de la pluie sur l’épiderme de l’homme et des bêtes, la végétation elle-même attaquée ainsi dans ses sources vives, disparaîtrait de la croûte terrestre.
*
L’averse qui approche a bruit de ruisseau. Bruit qui grandira en grondements de fleuve à mesure que progressera l’averse, pour se gonfler enfin en bruit d’océan quand l’ondée sera sur nous.
*
La pluie est une épingle d’eau, et une aiguille de lumière, dans le dé du vent.
(Sens plastique, 1948)
SPLEEN
Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l’horizon embrassant tout le cercle
Il nous verse un jour noir plus triste que les nuits;
Quand la terre est changée en un cachot humide,
Où l’Espérance, comme une chauve-souris,
S’en va battant les murs de son aile timide
Et se cognant la tête à des plafonds pourris;
Quand la pluie étalant ses immenses traînées
D’une vaste prison imite les barreaux,
Et qu’un peuple muet d’infâmes araignées
Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,
Des cloches tout à coup sautent avec furie
Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,
Ainsi que des esprits errants et sans patrie
Qui se mettent à geindre opiniâtrement.
Et de longs corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme; l’Espoir,
Vaincu, pleure, et l’Angoisse atroce, despotique,
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.
(Les Fleurs du Mal, 1857)
Pour info (Noël approchant), un Dictionnaire de la pluie (écrit par Patrick Boman, illustré par Romain Slocombe) vient de paraît au Seuil (22 euros pour 416 pages). Il rassemble légendes du monde entier et de toutes les époques, dictons, extraits littéraires et données scientifiques.
Merci pour l’info, ça me plait bien ce concept de dictionnaire de la pluie.
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A Shirakawa
nul poème, nulle chanson –
rien que la pluie.
*
Visite
Une présence étrangère
dans la chambre vide –
ah ! la pluie.
*
etc.
(L’ermitage des brumes, Occident, Orient et au-delà, 2005)
« Parlez-moi de la pluie et non pas du beau temps
Le beau temps me dégoûte et m’fait grincer des dents … »
« La pluie tombe comme nous tombons amoureux : en déjouant les prévisions. »
Vous aimez la pluie ?
J’arrive avec le kärcher !!!
L’éblouissant orage
(…)
Et voici maintenant, orage délié,
Que votre eau lumineuse, éparse et vive coule,
Passez autour de moi ces chaînes ces colliers,
Ce liquide métal qui scintille et qui roule !
Frappez-moi, flots d’argent, ruisseaux venus du ciel !
Frappez l’acacia, le sapin, la nuée ;
Traversez l’univers, étendez votre miel,
Posez votre moelleuse et traînante buée.
Grains d’argent, grains luisants, semailles de fraîcheur,
Enveloppez le monde, ô mes sources obliques !
Pénétrez chaque point de la terre, et chaque fleur,
Répandez votre immense et tintante musique ;
L’aubépine s’égoutte, un pin est dépité,
Le buis charmant et dru comme un toit vert ruisselle,
Voici tout en lambeaux la robe de l’été,
Orage ! que ta grâce est puissante et cruelle.
Mais moi qui t’espérais en craignant de mourir,
Je ne me plaindrai pas de ce luisant désastre,
Que le baiser soit long après un tel désir,
Fais bondir sur mon coeur tous tes liquides astres !
Beauté des gouttes d’eau qui ravissent les yeux,
Etoiles de la pluie, ô petites abeilles !
Pépins d’argent, avec un goût délicieux,
Raisin d’azur glissant sur de mouvantes treilles,
Eau plus belle que l’air et que le firmament,
Clair de lune liquide, éparse chevelure,
Symbole du divin et doux apaisement,
Guérison de la soif et de toute brûlure,
C’est vous que je préfère, et vous que je choisis
Parmi tous les joyaux de l’univers qui chante.
Orage ! crépitez sur mon coeur cramoisi :
Tu vois comme l’écalt de ta force m’enchante,
Je te bois sur mes doigts, et d’un râle fiévreux
Je te reçois en moi, dans mon coeur qui défaille,
Comme on boit un sorbet fondu, sucré, mielleux,
Au travers d’une douce et lumineuse paille…
(Oeuvres complètes)
L’orage
Voici le frais orage, ah ! que toute pluie
Descende sur mon coeur et baigne mon amour,
Que la campagne vive où l’eau roule ou s’appuie
S’égoutte sur ce coeur si fervent et si lourd.
Comme les arbres las qui reçoivent l’averse
Je tends assidument vers la fraîcheur de l’eau
(illisible)e audacieuse et chaude que traversent
Les regards de l’Amour et ses durs javelots.
Que je sois maintenant tiède, fraîche, apaisée,
Comme le bois mouillé sur qui l’onde reluit,
Que je laisse couler mon rêve et ma pensée
Ayant tout oublié et tout souffert de lui.
Et que pareillement aux feuillages humides
Qui font flotter leur claire évaporation,
Je sente s’en aller de mon âme fluide
Le brûlant souvenir de l’âpre adhésion…
(Oeuvres complètes)
Les giboulées
A l’Occident, là-bas,
Des nuages montent par tas,
Des nuages couleur d’ardoise sombre.
Ils s’élèvent tel un grand vol
Et leurs ailes font circuler des ombres,
De lieue en lieue, au ras du sol.
L’averse choit sous la nuée.
Battant les toits et les auvents
Comme les grains le creux d’un van ;
Les bois, là-bas, avec leurs branches remuées
Balayent les airs, de loin en loin.
Avecs ses bras géants, le vent du nord
La tord
Et la projette par rafales
Dans les jardins peuplés de bourgeons d’or ;
Tiges, pistils, rameaux, pétales
S’affalent ;
Elle déchiquette le blé nouveau
Et déchire le verdoyant manteau
Des espoirs neufs et des richesses végétales.
Les villages la regardent passer
Ainsi qu’une déroute ;
Les linges blancs qu’on sèche au long des routes
Sont balayés vers les fossés.
Des champs entiers, prés et broussailes,
Sont saccagés sous la mitraille,
Et les meules là-bas, dans le lointain,
Prises d’assaut jusques au grain
A travers l’or serré des gerbes et des pailles.
Mais voici le soleil qui là-haut reparaît ;
L’averse fuit et les fermes quand même espèrent
Avec un coeur tenace et profond et muet
Comme la terre.
(Les plaines)
La pluie
La pluie,
Sur les feuilles douces de mai,
La pluie,
Sur les gazons et sur les haies
Semble une amie
Qui visite les clos et les jardins vermeils,
Et bellement les réconforte,
Après chaque étreinte trop forte,
Des trop jeunes soleils.
Elle tombe, brusque et jolie,
Précède ou suit une embellie ;
Elle se hâte et dure peu ;
Elle est la soeur de la rosée,
Et ses larmes cristallisées
Mirent parfois tout le ciel bleu.
Un nuage la contient toute.
La lumière luit au travers
De son passage au long des routes ;
Les taillis frais, les fossés verts
Boivent ses eaux lustrales ;
Moineaux, bouvreuils, pinsons, avec leur bec mouillé,
Lissent tranquillement leur plumage souillé
Sur les branches d’un bouleau pâle ;
Le paysage entier semble se ranimer
Et longuement, là-bas, où le bois se recueille
On écoute le silence se parsemer
De mille bruits tintant gaîment de feuille en feuille.
Et les oiseaux, à l’unisson,
Se reprennent à leur chansons
Dès que l’averse fuit et passe ;
Et doucement, dans le verger d’en face,
Un cerisier secoue au vent volant
Sa voûte ;
Si bien que les dernières gouttes
Tombent en même temps
Que l’éparpillement de ses pétales blancs.
(Les plaines)
« Moi je t’offrirai
Des perles de pluie
Venues de pays
Où il ne pleut pas. »
Averse averse averse averse averse averse
pluie ô pluie ô pluie ô ! ô pluie ô pluie ô pluie !
gouttes d’eau gouttes d’eau gouttes d’eau gouttes d’eau
paraluie ô parapluie ô paraverse ô !
paragouttes d’eau paragouttes d’eau de pluie
capuchons pèlerines et imperméables
que la pluie est humide et que l’eau mouille et mouille !
mouille l’eau mouille l’eau mouille l’eau mouille l’eau
et que c’est agréable agréable agréable
d’avoir les pieds mouillés et les cheveux humides
tout humides d’averse et de pluie et de gouttes
d’eau de pluie et d’averse et sans un paragoutte
pour protéger les pieds et les cheveux mouillés
qui ne vont plus friser qui ne vont plus friser
à cause de l’averse à cause de la pluie
à cause de l’averse et des gouttes de pluie
des gouttes d’eau de pluie et des gouttes d’averse
cheveux désarçonnés cheveux sans parapluie
(L’instant fatal)
L’orage
Tout à coup l’orage accourt
avec ses grosses bottes mauves
il piétine les bégonias les blés les prés
il marche sur les chênes
il emplit les rus de son urine
il crache de la boue
il broie l’air entre ses bras
et puis il s’en va
content de lui
(Battre la campagne, 1968)
http://chansons.ina.fr/index.php?vue=notice&id_notice=I00019586
Il pleut, il pleut, jeune écolière.
Le ciel est rempli de moutons.
Pour une averse aussi légère,
Quiresterait à l amaison ?
Les fils de pluie font de la terre
Une volière de nylon.
Qui n’aimerait voir aux buissons,
Danser les gouttes de lumière ?
Il pleut, il pleut, jeune écolière.
Le ciel va rentrer ses moutons
Et le soleil, dans la clairière,
Fait déjà briller les marrons.
(Pigeon vole, 1958)
Dansons sous la pluie :
http://www.dailymotion.com/relevance/search/pluie/video/xqytw_pluiepluie_fun
Excellent (surtout pour ces quelques secondes de « bascule »… pendant lesquelles le doute s’installe sans être encore sûr)
Bravo – en passant – aux publicitaires qui nous ont confectionné ce ti bijou !
La pluie est une jeune femme
un peu jalouse
Il semble oui que l’on voit mieux
après son passage sa colère
On voit ce qui est ce qui brille
le feu de paille de ce qui est
les ailes blanches d’une fleur
les bras verts d’un feuillage
la vie passante limpide
éternelle
(La vie passante, 1990)
*
Rien, sinon la pluie – mais la pluie, ce n’est pas rien, elle éloigne le ciel comme on repousse un meuble pour faire le ménage, elle chante en nettoyant les vitres, les visages et les pensées, elle prépare la venue de quelqu’un qui arrivera juste après elle, quelqu’un qui aime ce qui brille et sent le neuf – une fée ou le Christ enfant.
(Autoportrait au radiateur, 1997)
*
« Je n’aime pas la neige à cause du froid » me dit le moine, et ce fut aussi stupéfiant que s’il m’avait dit : « Je n’aime pas Dieu à cause de la mort ». Chaque fois que j’entends quelqu’un maudire la neige ou la pluie, cela me fait de la peine, comme si on disait du mal d’un de mes proches, mais entendre un moine médire de la neige me déchire l’âme.
(Une bibliothèque des nuages, 2006)
Dehors, c’est la pluie. insistante, fine, elle vide le ciel de toute pensée, recouvre la terre d’un silence épais, où s’embourbent les anges, les choses, le regard. Une pluie de plusieurs siècles. Elle naît de rien, elle tombe sur rien. Elle n’offre à voir qu’elle-même, comme un mouvement infirme, indéfiniment répété.
(L’homme du désastre, 1986)
*
On est dans la douceur d’une maison. La pluie amène une deuxième maison dans laquelle on entre, plus claire que la première, plus sûre aussi, celle de l’enfance. On regarde la pluie sur l’enfance. On regarde ce mélange des saisons : un peu d’automne sur l’été, comme une tache sur une pomme.
(Lettres d’or, 1987)
*
Le soleil fait appel en moi au courage. Le beau temps est un temps qui me dit : voilà, tout est bleu et limpide, j’ai fait mon travail, à toi de jouer. La pluie, à l’inverse, me délivre de tout projet, elle me dit : il te suffit d’être là et de me contempler, je m’occupe du reste, je danse, je pleure, je brille et j’écris à ta place.
(L’épuisement, 1994)
*
La pluie ne me parle pas de la pluie mais de quelqu’un d’autre dont elle est le petite fille.
(Mozart et la pluie, 1998)
*
La pluie frappait à mes carreaux, le vent secouait mes volets. C’étaient des amis élevés à la dure et pleins de joie. Ils voulaient me délivrer. Ils criaient pour que je les rejoigne.
(Prisonnier au berceau, 2005)
Je crois que je n’ai jamais lu personne qui faisait autant appel aux anges que Bobin.
Parallèlement, je ne connais pas d’écriture aussi poétique que la sienne…
Et d’après ce que j’ai pu comprendre, c’est l’empreinte de l’ange, ce « chut » silencieux qui le pousse à écrire, parce que l’ « écriture est ce qui se rapproche le plus du silence. » La sienne, sans aucun doute.