Sonny Boy Williamson II
Il y a déjà pas mal de temps que l’idée d’ouvrir une rubrique sur les grands bluesmen du 20ème siècle me trotte dans la tête. J’ai longtemps hésité car il m’est carrément impossible d’ouvrir une série vidéo sans consacrer la première à Sonny Boy Williamson. Or j’ai déjà présenté sur ce blog Bye bye Bird, mon morceau de blues fétiche qui, à lui seul, représente tout l’esprit du blues. Et puis finalement, je n’avais mis à l’époque que le lien alors qu’aujourd’hui j’ai appris à mettre ces vidéos directement en ligne. Alors tant pis, une fois n’est pas coutume, revoila ce célèbre morceau. Il exerce toujours sur moi la même fascination. Et tant pis si on a déjà dit beaucoup de choses sur ce blog à propos de cette prestation (rechercher éventuellement dans la colonne de droite mon article du 16 décembre 2006).
Drôle de bonhomme quand même que ce Rice Miller qui semble être né en 1912 alors qu’il a toujours affirmé l’être en 1999. Ce n’était probablement qu’une ruse de sa part pour convaincre le public qu’il avait été le premier artiste du nom de Sonny Boy Williamson. En fait, Rice Miller a utilisé le nom de quelqu’un qui était déjà connu (John Lee Williamson dit « Sonny Boy Williamson »). Rice Miller, le Sonny Boy Williamson dont je vous parle aujourd’hui est donc souvent appelé dans la littérature, par souci de vérité historique, Sonny Boy Williamson II.
Drôle de bonhomme aussi que ce grand dégingandé qui arrivait sur scène avec un parapluie, un chapeau melon, un sac précieux dans lequel il rangeait son harmonica, des fringues de luxe hors de la portée de sa pauvre bourse de bluesman et un langage paraît-il plutôt cru.
Dans le début des années 60, Sonny Boy profitera de la vague du British Blues pour se faire une solide réputation en Europe, à l’occasion des tournées de l’Américan Folk Blues Festival (dont j’ai déjà parlé sur ce blog) et à l’occasion d’enregistrements avec des goupes blancs tels que les Yardbirds ou les Animals. Mais la discographie essentielle de Sonny Boy Williamson que je vous conseille est l’ensemble des 70 chansons enregristrées pour le label Chess entre 1955 et 1964. Sonny Boy est mort en 1965.
J’ai écrit « revoila ce célèbre morceau ». « Célèbre » ? Enfin, n’exagérons rien. Sur le blogadupdup peut-être mais ailleurs … !
Dur de rajouter des commentaires à ce qui s’est dit en décembre dernier… et à ce que tu rajoutes ici.
(J’aime beaucoup, entre autres, les interventions d’Emmanuel, en introduction et conclusion. On ne pouvait trouver mieux pour un morceau intitulé « Bye bye Bird », n’est-ce pas ?)
Voilà ce que j’avais écrit le 16 décembre dernier :
”Image en noir et blanc. Pièce austère au décor très sobre. Au milieu, un grand bonhomme à l’allure dégingandée. Et qui semble un peu étranger à notre monde.
Le son de l’harmonica retentit. Première notes longues et plaintives. Puis un rythme lancinant qui s’installe. Caméra hésistante qui zoome lentement pour s’arrêter sur un visage étonnant. La voix retentit. Un peu lasse mais si émouvante. Les trois mots répétés ressemblent à un hymne incantatoire Bye bye Bird, Bye bye Bird, … Devant le visage, les mains évoluent de manière incroyable. A-t-on déjà vu des mains pareilles ? Les doigts se lient, se délient et jouent une danse reptilienne autour de l’harmonica. Ils semblent presque faire l’amour à l’instrument. Le corps est animé de mouvements chaloupés. L’homme fait corps avec sa musique. Le deuxième couplet est aussi dénudé. Pendant que résonnent les trois mots Bird I’m gone, la caméra refait le chemin inverse. Zoom arrière donc. L’harmonica est alors planté dans le bouche et les mains continuent ailleurs leur travail : les doigt claquent puis les mains se frappent.
La danse hypnotique se termine en douceur. Dos voûté, saluant timidement le public, Sonny Boy Williamson quitte le champ de la caméra sur la pointe des pieds. Le coeur du spectacteur bat alors très fort.
Scène filmée en 1963, avec une seule caméra. Sobriété de moyens typique de l’époque. Et qui sied à merveille à cette musique dépouillée. Toute la magie du blues condensée dans trois minutes d’émotion.”
En relisant cet article, je me rends compte que j’écrivais infiniment mieux il y a un an. Si je continue à dégringoler à ce rythme, ça promet ce blog … !
Allez tout de même voir les commentaires de cet article du 16 décembre 2006, beaucoup de choses avaient alors été dites par nos amis blogueurs.
C’est pas que tu écrivais mieux il y a un an, Bernard, c’est juste que c’est impossible (même pour un pro de l’écriture) de « tenir » ce niveau-là à la fréquence où tu produis.
Je l’avais déjà dit à l’époque mais sincèrement, ce texte-là, pour moi, c’est un vrai petit bijou : des phrases courtes, toutes simples (sans emphase) et par petites touches impressionnistes le tableau se dessine et toute l’émotion est retranscrite. Chapeau bas !