LA GRANDE MANIPULATION. Et s’il y avait un gros coup monté derrière toute cette histoire de grippe aviaire ? Le truc est quand même un peu gros : le virus commence à faire parler de lui dans les élevages industriels asiatiques et on en arrive, trois ans après, non pas à condamner les gros élevages concentrationnaires comme il aurait été logique de le faire, mais à interdire les petits élevages artisanaux ou amateurs de plein air et même à accuser sans retenue les oiseaux sauvages.
Le Canard Enchaîné de la semaine dernière nous donne des arguments convaincants, émanant de Juan Lubroth, expert à la FAO, et de l’ONG espagnole « Grain », qui accusent au contraire l’élevage industriel d’être le grand coupable dans cette affaire. Voici ces arguments qui s’appuyent sur des constats :
1 – C’est dans les pays où la production intensive de volailles est la plus développée, notamment dans des fermes industrielles intégrées à de grands circuits commerciaux, qu’est apparue la grippe aviaire.
2 – La propagation de la maladie ne s’est pas faite selon les itinéraires et les saisons de migration des oiseaux mais correspond aux voies de transport des volailles, oeufs à couver, aliments, notamment par la route et le chemin de fer.
3 – Il y a toujours eu des grippes aviaires dans les petits poulaillers mais qui n’ont jamais évolué vers des formes pathogènes, alors que ce virus, qui est plutôt bénin en temps normal, trouve dans les grandes concentrations industrielles de volailles (27 poules par mètre carré) des conditions idéales pour muter.
4 – Ce n’est pas un hasard si le Laos, bien que survolé par des millions de migrateurs, est l’un des rares pays asiatiques à ne pas être touché par le virus : il a interdit les frontières à la volaille industrielle de Thaïlande et les éleveurs laotiens élèvent leurs poules dans des conditions normales, c’est à dire que les volailles ne mangent ni matière fécales, ni litières … comme dans les autres élevages asiatiques (vous saviez, vous, que le poulet que vous dégustez le dimanche avait avalé tout ça !).
Finalement, avec un peu de recul, on peut dire que tous les ingrédients étaient réunis pour que la machine s’emballe : des lobbyings puissants, des politiques qui lèchent les bottes du patronat, des médias qui ne peuvent qu’en rajouter une couche de plus, au risque sinon de plus faire de l’audience, des occidentaux à qui l’on a inculqué la culture du « risque zéro » dans un monde qu’ils souhaitent aseptique et qui ont le trouillomètre à zéro dès que se pointe le moindre microbe (ah, les pauvres, s’ils savaient qu’on en respire 14 000 par heure en moyenne !).
Ce qui m’inquiète dans cette histoire, et tant que simple citoyen qui a droit à l’information, ce n’est pas qu’on ait cherché à me manipuler (mes articles montrent au contraire que je n’ai pas été dupe depuis le début), mais que nous sommes peut-être manipulés à tous les niveaux de l’information, sur tous les sujets. Même dans un journal comme leMonde.fr, plutôt du genre sérieux, que je lis tous les jours, je n’ai trouvé aucune des infos énumérées ci-dessus qui montrent du doigt les élevages industriels.
Justement, à propos de ce journal, je vais terminer cet article par un petit trait d’humour. Il y a quinze jours, leMonde.fr publiait un article censé montrer que les oiseaux migrateurs, en étant bouffés par les chats, pouvaient transmettre le virus au genre humain. Mais la photo qui illustrait l’article montrait un chat en train de croquer, non pas un oiseau sauvage, mais … un oiseau domestique ! Quelle art de la mise en scène !